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enfin l’Evening-Post,de Thomas Fleet. New-York en avait deux : la Gazette et le Journal. Dans le, Maryland, une Gazette avait été publiée à Annapolis, de 1727 à 1736, par William Parker. Après neuf années d’interruption, elle fut ressuscite en 1745 par Jonas Green, et ne cessa plus de paraître régulièrement. La Gazette de Maryland existe encore, et se trouve le plus ancien des journaux américains. La Caroline du sud avait une Gazette à Charlestown depuis 1731, le Rhode-Island une à Newport depuis 1732, la Virginie une également à Williamsburgh depuis 1736. La Pennsylvanie était, après le Massachusetts, la province la mieux partagée. On trouvait à Philadelphie la Gazette et le Mercury, qui devait en 1742 passer aux mains de William Bradford et devenir le Journal de Pennsylvanie, et à Germantown un journal allemand, fondé en 1739 par un nommé Sower. Ce dernier fait est curieux, mais il n’est pas le seul qui prouve que les Allemands affluaient déjà en Pennsylvanie, où ils forment aujourd’hui au moins la moitié de la population. Sur six imprimeries alors établies dans la colonie, deux n’imprimaient que l’allemand, deux imprimaient l’allemand et l’anglais, deux seulement étaient complètement anglaises. En 1743, un journal allemand fut établi à Philadelphie par un allemand nommé Anthony Ambruster, à qui Franklin dut défendre de faire usage de son nom. En 1751, un journal fut publié à Lancaster, moitié en allemand et moitié en anglais. Du reste, dès cette époque, quand on voulait qu’une annonce s’adressât à tout le monde, on était obligé de la publier à la fois en anglais et en hollandais, afin qu’elle fût comprise des Allemands de la Pennsylvanie et des riches familles hollandaises de la province de New-York.

À la date à laquelle nous sommes arrivés, et en présence de quatorze journaux, nous pouvons considérer la presse périodique comme bien établie en Amérique. Les années suivantes virent naître, un nombre encore plus considérable de feuilles politiques : bientôt non-seulement chaque colonie, mais chaque ville un peu importante aura la sienne. Ce serait donc se perdre dans des détails inutiles que de vouloir faire connaître l’origine et la fortune de ces feuilles, souvent insignifiantes et presque toujours éphémères. C’est l’histoire collective des journaux qu’il nous faut poursuivre désormais, en essayant de montrer le rôle de la presse dans les affaires intérieures des colonies et son influence sur les événemens.


II

Les écrivains qui, soit en Angleterre, soit en France, se sont occupés des États-Unis, ne font presque tous commencer l’histoire des colonies américaines qu’à la veille même de leur rupture avec la métropole, à l’opposition que rencontra l’acte du timbre. Si les cent années qu’on néglige ainsi méritaient cet oubli, ne serait-ce point un légitime sujet de surprise que de trouver tant de décision, de fermeté et d’ensemble dans la résistance des colonies sur une question de principe ? car il n’y avait rien d’excessif ni d’onéreux dans les impôts décrétés par le parlement. Cette lutte juridique et légale qui précède la lutte à main armée, cette union, cette énergie, cette prudence soutenues pendant quinze ans, ne sont point le fait d’un peuple au berceau. Le