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eux qui ont commencé la guerre contre les royalistes et les catholiques romains… Il n’est pas vrai que le gouvernement et la famille royale aient encouragé la guerre civile et n’aient pas fait tout ce qui était en leur pouvoir pour… protéger les protestans ; mais le catholicisme de Monsieur, de Madame et du duc d’Angoulême a donné un prétexte pour ces accusations… Notre intervention ne ferait qu’empirer les affaires. »

L’horreur du jacobinisme, c’était là le sentiment dominant de l’illustre guerrier, et parfois il croyait le voir là où des esprits moins prévenus ne l’eussent certainement pas aperçu. Dans la lettre dont je viens de citer quelques phrases, il signale avec une sorte d’effroi une réunion, ou, comme il l’appelle, un club de députés qui se rassemblaient dans une maison de la rue Saint-Honoré. Il prétend qu’elle est fondée sur le jacobinisme, et que si elle venait à se consolider, elle constituerait un véritable danger. On aura peine à croire que le club jacobin dont il s’épouvantait à ce point, c’était un certain nombre de députés très-monarchiques, grands amis de l’ordre, qui, effrayés des premiers emportemens de la majorité de la chambre introuvable, se concertaient dès lors à petit bruit pour essayer de la contenir, et qui, s’organisant bientôt après en une minorité imposante sous l’habile et sage direction de MM. de Serres, Pasquier, Royer-Collard, devaient prêter un si utile appui au duc de Richelieu.

En résumé, la politique de l’Angleterre, comme celle des autres cours alliées, était, alors tout à la fois de soutenir le gouvernement du roi contre les attaques de ses ennemis et de le maintenir dans le système de prudens ménagemens qui seul, à ce qu’elles pensaient, pouvait, avec le temps, lui donner les moyens de se consolider en lui ramenant l’opinion du pays. L’affermissement du régime constitutionnel, qui offrait des garanties à tous les intérêts contre une réaction aveugle, était considéré par les gouvernemens absolutistes eux-mêmes comme la condition essentielle de la tranquillité de la France et par conséquent de la paix de l’Europe. Aussi, le jour même de la signature du traité de paix qui réglait l’occupation des places fortes et des frontières par 150,000 soldats étrangers, le 20 novembre 1815, un autre traité fut-il conclu entre l’Autriche, la Grande-Bretagne, la Prusse et la Russie, pour renouveler les stipulations offensives et défensives des traités de Chaumont et de Vienne, à l’effet d’assurer l’ordre de choses établi en France sur la base du maintien de l’autorité royale et de la charte constitutionnelle, ainsi que sur l’exclusion à perpétuité de Napoléon Bonaparte et de sa famille du pouvoir suprême. On y convint aussi de renouveler à des époques déterminées des réunions consacrées aux grands intérêts communs et à l’examen des mesures qui seraient jugées salutaires. Ce traité fut communiqué au duc de Richelieu par une note collective dans laquelle les ministres