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DE LA REFORME


ET


DU PROTESTANTISME





Histoire de la Réformation du seizième siècle, par J.-H. Merle d’Aubigné ; Paris, quatrième édition, 1853.





I

Parmi les choses qu’on a voulu mettre à la mode dans ces dernières années, il faut compter le dédain du protestantisme. On a dit et répété avec la plus grande assurance que ce n’était pas une religion. Si, dans leur ferveur, des catholiques orthodoxes avaient seuls tenu ce langage, il n’en serait pas plus juste, mais il serait excusable : une foi ardente se fait pardonner l’intolérance spéculative ; seule, elle peut, sans trop de contradiction, se permettre les condamnations absolues. Mais des politiques épris du principe d’autorité, des conservateurs indifférens, des sceptiques que la discussion lasse, et qui aiment que la force les décide, ne sachant pas se décider par la raison, ont imaginé un jour qu’une croyance fortifiée dans les épreuves de la guerre et de la persécution, et qui, propagée et soutenue par tant de sages et fermes esprits, échauffe et maîtrise de grandes nations, était, comme on dit, une simple critique, une controverse sans terme, une pure négation. Il serait étrange cependant qu’une vide combinaison d’analyse et de polémique eût suffi si longtemps au gouvernement moral des sociétés où le frein religieux demeure le plus puissant, et que trouble le moins l’esprit destructeur