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plus eu seulement les listes des libéraux et des catholiques, il y a eu surtout les listes des faubourgs et de la ville de Bruxelles. Les faubourgs ont repoussé la candidature de ceux des représentans sortans qui ont voté l’annexion, notamment de M.M. Charles de Brouckère, bourgmestre de Bruxelles, Thiefry, Anspach, n’admettant que les noms de MM. Verhaegen, Orts, qui ont repoussé la loi, et créant de nouvelles candidatures anti-urbaines. Bruxelles à son tour a maintenu les noms frappés d’une telle exclusion, et au milieu de ce conflit a surgi une candidature assez imprévue, celle de M. Jules Bartels, dont les opinions passaient autrefois pour républicaines, et qui, par une coïncidence singulière, s’est trouvé porté à la fois sur la liste du parti catholique et sur la liste des faubourgs. Que sortira-t-il de là ? ou plutôt qu’est-il déjà sorti du scrutin ? On le saura bientôt. Dans tous les cas, c’est une lutte d’un caractère évidemment plus local que politique. Le résultat ne saurait influer sur la situation générale de la Belgique, ni même sur la situation particulière du cabinet de Bruxelles.

Le ministère belge actuel, quand il se formait il y a deux ans, ne se rattachait par son origine à aucun parti exclusif. Il avait plutôt pour mission de tempérer les irritations des partis intérieurs, en faisant prévaloir une politique de conciliation. C’est ce qui explique l’espèce de neutralité qu’il a conservée entre les opinions opposées. Le cabinet de Bruxelles se formait surtout pour tirer la Belgique d’une situation internationale difficile. Il y a réussi, il a mené à une heureuse fin les différends commerciaux qui existaient par le traité récemment conclu avec la France. Entre les deux gouvernemens de Bruxelles et de Paris, il y a eu des rapprochemens que tout le monde a remarqués, et dans les circonstances où se trouve actuellement L’Europe, M. H. de Brouckère, le chef du ministère, a pu en toute sécurité caractériser la situation libre et simple de la Belgique. Cette situation est celle que la loi même de son existence lui impose une situation de neutralité permanente. Liée à l’Autriche par le récent mariage de l’héritier du trône avec une archiduchesse, rattachée depuis longtemps à l’Angleterre par tous les intérêts aussi bien que par des liens plus intimes, rapprochée de la France, avec laquelle elle a tant de points de contact, indépendante vis-à-vis de tous les états, la Belgique, au milieu des conflits de l’Europe, a la fortune de pouvoir poursuivre en paix le cours de ses travaux intérieurs et appliquer sans danger ses libres institutions. La crise électorale, dans de telles conditions, n’est que la pratique régulière de ces institutions mêmes.

Le Danemark se trouve engagé depuis quelque temps dans une crise dont l’issue reste encore un problème et qui a un double caractère. En apparence, c’est une lutte tout intérieure entre la politique constitutionnelle, libérale et la politique absolutiste. Dans le fond, à cette question il vient s’en joindre une autre, qui n’est pas moins grave : il s’agit de savoir de quel côté la politique danoise inclinera au point de vue extérieur. Subira-t-elle l’influence de la Russie ? se rapprochera-t-elle des puissances occidentales ? On sait en quoi se résume cette lutte et quels en sont les élémens. D’une part, le pays tout entier s’est prononcé avec une vivacité et une unanimité singulières pour le maintien « le la constitution du 5 juin 1849, ou du moins, afin de parler plus exactement, pour le principe d’une constitution nouvelle con-