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La détermination relative de l’impôt était une opération plus délicate que l’arpentage, et qui demandait plus de précautions. Les terres furent divisées en trois classes, suivant leur degré de fertilité. On détermina le produit moyen du bigah pour chaque classe, et la moyenne de ces trois produits fut considérée comme représentant le produit du bigah. Un tiers de ce produit constitua le droit du gouvernement ou l’impôt territorial. Le principe une fois arrêté, le gouvernement n’en reconnut pas moins à chaque cultivateur qui se croyait trop imposé le droit de réclamer une nouvelle mesure de ses terres, avec le partage de la récolte qui en était la conséquence. En outre, afin de concilier les droits du fisc avec la justice due aux cultivateurs, il fut décidé que les terres qui n’avaient pas besoin de se reposer paieraient la totalité de l’impôt chaque année, — que les terres en jachère ne paieraient que lorsqu’elles seraient remises en culture, — que les terres envahies par l’inondation, ou qui auraient été trois années sans culture et exigeraient quelques dépenses pour les remettre en valeur, ne paieraient que les deux cinquièmes la première année, trois cinquièmes la seconde, quatre cinquièmes les deux années suivantes, et l’impôt total la cinquième année. Toute terre enfin qui aurait été improductive pendant plus de cinq ans obtiendrait des conditions plus favorables encore.

Ces points étant ainsi réglés, il restait à arrêter comment, dans la plupart des cas, le paiement de l’impôt en nature serait remplacé par un paiement en argent. Le gouvernement se fit donc remettre les prix courans des denrées, dans chaque commune, pour les dix-neuf années antérieures au mesurage des terres[1], et la valeur des récoltes fut estimée d’après la moyenne des prix fournis par ces documens. À l’expiration de dix années, l’assiette de l’impôt fut établie sur la moyenne des perceptions faites pendant ces dix années, et on dut le régler ainsi, pour l’avenir, de dix ans en dix ans. Ce système de cadastre et de perception de l’impôt est encore en usage aujourd’hui, même dans les parties de l’Hindoustan qu’Akbăr n’avait pu ranger sous son autorité et où les avantages qui distinguent ce mode de perception l’ont fait adopter.

En même temps que cette grande mesure recevait son exécution, Akbăr abolit un nombre infini d’impositions indirectes et d’honoraires exigés par les agens de l’administration, et qui pesaient de la manière la plus vexatoire sur les classes inférieures. Le résultat de ces divers changemens fut de réduire considérablement les demandes du fisc, c’est-à-dire le revenu brut, mais de diminuer, dans une

  1. Voir sur la fixation de cette période le chapitre de l’Ayin-Akhăry intitulé Of the nineteen years Collections, vol. Ier, p. 292.