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entre les états de la confédération. Ce sont ensuite des menaces, menaces paternelles toutefois, avertissemens faits d’un ton débonnaire, et la note se termine par ces mots : « Que l’Allemagne se donne la forme politique qu’elle voudra, l’empereur respectera son indépendance ; il ne songe pas à abandonner la position qu’il a toujours tenue vis-à-vis d’elle. » On a vu quelle était cette position ; la place était bonne à garder. Cette note où tous les tons, menaces, caresses, reproches affectueux, condescendance bénévole, se croisaient avec une si étrange habileté, était précisément comme l’abrégé du rôle joué par les tsars dans les affaires intérieures des états germaniques. Toute l’Allemagne en frémit. Quel était le but caché de ce singulier manifeste ? Voulait-on irriter l’Allemagne ? espérait-on pousser à bout l’esprit de révolte ? Ce qui est certain, c’est que cette note du 6 juillet 1848 était une sorte de miroir où l’Allemagne pouvait considérer son abaissement et sa misère. Aujourd’hui même les publicistes allemands en poussent des cris de douleur. Les révolutions de 1848 leur réservaient cependant des épreuves plus humiliantes encore : un an après cette note du 6 juillet, comme si les événemens obéissaient aux intentions de la diplomatie russe, l’Autriche se croyait obligée d’invoquer le secours du tsar contre l’insurrection hongroise. M la Prusse, ni la Bavière, ni les troupes fédérales ne pouvaient, par une assistance opportune, éloigner ce dur protectorat ; la révolution était partout, à Berlin et à Francfort, à Dresde et à Stuttgart, dans le duché de Bade et dans le Palatinat. L’armée russe franchit les frontières autrichiennes ; le tsar hésite un instant : soutiendra-t-il l’Autriche ébranlée ? établira-t-il la république hongroise sous le patronage russe ? C’est pour l’Autriche qu’il se décide ; ne vaut-il pas mieux rester le protecteur de l’Allemagne entière que d’être le suzerain des Magyars ? Et bientôt, quand les Russes et les Autrichiens réunis ont triomphé de cette héroïque résistance d’un petit peuple, un général russe peut dire au tsar Nicolas : La Hongrie est aux pieds de votre majesté !


CONCLUSION.

Il était bien temps que l’Allemagne se réveillât ; la crise orientale lui a fourni une merveilleuse occasion de protester contre ce joug séculaire, et ce ne sera pas une des moindres victoires de la guerre d’Orient d’avoir aidé les peuples germaniques à rejeter loin de leurs frontières l’invasion des Slaves. Que les journaux russes d’Autriche, de Prusse et de Bavière, invoquant on ne sait quel intérêt national, continuent à prêcher la neutralité de la confédération, ce masque de patriotisme ne cache plus leurs desseins. La Gazette d’Augsbourg, entremêlant ses documens suspects d’articles mieux inspirés, peut soutenir et tromper les insurgés de la Grèce, exagérer