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stipulations sont destinées à garantir le sort des naufragés. Une particularité de cette négociation, c’est que les commissaires japonais ont vivement insisté pour que le gouvernement des États-Unis ne permît jamais à une dame de visiter le Japon. Les négociateurs n’ont pu même arriver à s’entendre, et la difficulté est encore à résoudre. Quelle chance ce traité offre-t-il aux autres pays ? Quelle perspective ouvre-t-il au commerce général ? C’est là ce qu’il serait difficile de dire. Ce qui est certain, c’est que les États-Unis n’ont point tardé à tirer avantage de la facilité qui leur était offerte de trouver du charbon sur leur roule. Ils viennent de créer une ligne de paquebots à vapeur de la Californie en Chine et faisant relâche au Japon. C’était là le but de leur traité, et néanmoins ils ont ouvert la brèche par où tous les autres peuples peuvent entrer à leur tour.

C’est un intérêt plus immédiat qui s’agite dans les relations des États-Unis avec le Mexique. L’Union achète tout simplement morceau par morceau la république mexicaine. Il y a quelques mois, on s’en souvient peut-être, le général Gadsden allait négocier avec le gouvernement du général Santa-Anna un traité qui cédait une portion assez considérable du territoire mexicain dans la vallée de Messilla aux États-Unis, et qui en retour assurait au Mexique une certaine somme qui devait être immédiatement versée. Ce traité, tout onéreux qu’il fût, garantissait encore dans son texte primitif quelques intérêts mexicains ; mais par malheur il a été modifié à Washington. D’abord la somme à payer a été réduite de 15 millions de piastres à 10 millions. En outre les États-Unis ont supprimé un article qui leur imposait l’obligation de faire poursuivre les aventuriers, toujours prêts à violer le territoire mexicain. Enfin les Américains deviennent à peu près maîtres de l’isthme de Tehuantepec, où était projetée, comme on sait, une voie de communication interocéanique. Le général Santa-Anna est entré, à ce qu’il paraît, dans une fureur singulière quand il a appris ces changemens. Il ne parlait de rien moins que de refuser la ratification. Le fait est pourtant qu’il a ratifié le traité par cette raison souveraine, qu’il a besoin d’argent et que les finances mexicaines sont dans le plus déplorable état de désorganisation. Le déficit du Mexique, sans compter la dette extérieure et intérieure, s’élève à quelque chose comme 17 millions de piastres, environ 85 millions de francs. Quant à ses ressources, elles sont à la merci des révolutions, et malheureusement aussi souvent des dilapidations. Le général Almonte, représentant de Santa-Anna à Washington, a donc touché déjà 7 millions de piastres sur l’indemnité des États-Unis pour le dernier traité. Cette somme contribuera-t-elle à améliorer les finances du Mexique ? Il serait difficile de le dire. Une chose certaine, c’est qu’il n’aura plus son territoire, et pour les États-Unis ce territoire est d’un grand prix, puisqu’il permet d’établir une communication directe de l’Océan Atlantique à l’Océan Pacifique.

Le traité avec le Mexique était depuis quelque temps la grande affaire des États-Unis. Voilà cette question vidée comme l’ont voulu les passions américaines. Il reste une autre question qui n’est pas moins grave, c’est celle de Cuba. Elle est née, comme on sait, du traitement que le capitaine-général de La Havane a fait essuyer au navire américain le Black-Warrior, ou plutôt cet incident n’a été qu’un prétexte. Dans le fond, après le premier bruit, le