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qu’en insérant ici la plus grande partie d’une lettre écrite par lord Castlereagh à son frère, lord Stewart, le 16 septembre 1820, et destinée à lui servir d’instructions confidentielles dans les conférences du congrès.


« … Avec tout le respect et rattachement que je porte au système de l’alliance tel qu’il a été réglé par les arrangemens d’Aix-la-Chapelle, je douterais de la prudence, ou, en réalité, de l’efficacité d’une application positive de ses formes et de ses prescriptions dans l’occasion actuelle. Si le danger existant provenait d’une violation évidente des stipulations de nos traités, une réunion extraordinaire des souverains et de leurs cabinets serait indubitablement une mesure de bonne politique ; mais alors que le danger provient de convulsions intérieures d’états indépendans, la convenance de hasarder une telle démarche est beaucoup plus contestable, et quand nous nous rappelons à quels funestes malentendus, à quelle irritation populaire ont donné naissance, dans les premiers temps de la précédente guerre révolutionnaire, les conférences de Pilnitz et la déclaration du duc de Brunswick, nous sommes portés à en conclure que tout ce qu’on pourra faire pour la sûreté générale contre les mouvemens insurrectionnels de soldats conspirateurs et rebelles ne devra être entrepris qu’après une mûre délibération, de la manière la mieux calculée pour ne fournir aucun aliment aux calomnies et aux passions, comme aussi pour justifier aussi pleinement que possible les dispositions auxquelles on s’arrêtera par une nécessité locale et spécifique résultant du cas particulier. J’espère donc que l’empereur de Russie voudra bien renfermer la portée des entrevues de Troppau dans les limites prudentes que propose son allié l’empereur d’Autriche, et que tout ce qu’on pourra faire dans ce cas particulier sera fait sans hasarder de déclarations contenant des engagemens universels qu’il serait impossible de tenir… Des dissertations sur des principes abstraits ne serviraient de rien aujourd’hui, si on ne les soutenait pas… Autant que j’ai pu en juger par l’examen du mémoire que le ministre autrichien a soumis à nos réflexions, il me semble que ce mémoire touche à peine la question véritable. Il affirme en fait la captivité du roi de Naples, et il propose de fonder sur ce fait un engagement aveugle qu’aucun gouvernement responsable ne saurait contracter… La substance de ce document se trouve dans la série de propositions… Par laquelle il se termine. En les joignant aux préparatifs… de l’Autriche, et à sa volonté bien connue d’envoyer une armée dans le royaume de Naples pour la délivrance du roi et la destruction de l’ordre de choses existant, il ne peut y avoir aucun doute que les propositions dont il s’agit, si on les acceptait, équivaudraient en substance à la formation d’une ligue hostile de la part des cinq puissances contre le gouvernement de fait de Naples. Si toutes sont engagées à ne le reconnaître que d’un commun consentement, si la force, dans le cas où elle serait nécessaire, doit être employée pour le renverser, toutes deviennent parties principales dans la guerre, non-seulement moralement, mais en droit, bien qu’il puisse arriver que toutes ne prennent pas les armes pour l’accomplissement de la résolution arrêtée en commun. Or c’est là un concert dans lequel le gouvernement britannique ne peut pas entrer : 1o parce qu’il se lierait parla à des