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de la vie humaine.


y aurait-il quelques objections à faire à cette manière de traduire la Genèse ; mais nous préférons cette explication au système de Buffon, pour qui le corps de l’homme devait croître plus lentement avant le déluge, parce que la terre était moins solide qu’elle ne l’est aujourd’hui, et que la gravité n’agissait que depuis peu de temps.

Quoi qu’il en soit, après Abraham l’Écriture ne cite plus d’exemples de longévité à beaucoup près aussi anormaux. Les plus remarquables sont : Abraham, mort à 175 ans, Isaac à 180, Jacob à 145, Ismaël à 137, Sara à 127, Moïse à 120, Joseph et Josué à 110. À mesure qu’on avance dans l’histoire sainte, les longues vies deviennent beaucoup plus rares, et ne sont plus que de 100 ans pour Elisée, de 90 pour le prophète Elie. Par exception, on lit dans le livre Ier des Machabées que le roi Antiochus Épiphane mourut âgé de 149 ans.

Plusieurs des hommes illustres de l’ancienne Grèce sont parvenus à un grand âge. Epiménide de Crète vécut, dit-on, 153 ans, le sophiste Gorgias de Leontium 107, Démocrite 109, le musicien Xénophile 108, Isocrate et le stoïcien Zenon près de 100. Xénophon le panthéiste et Apollonius de Tyane fournirent également un siècle de vie. Pline et Lucien rapportent beaucoup de cas de longévité parmi les princes, les guerriers, les sénateurs romains, les orateurs, les poètes et les philosophes. Quelques-uns méritent d’être rappelés. Il est bien entendu que nous les choisissons parmi ceux que Pline appelle des faits généralement avoués et reconnus, confessa.

Arganthonius de Cadix, et c’est Cicéron qui le dit, monta sur le trône dans sa quarantième année et régna 80 ans. Perpenna atteignit 98 ans, ne laissant vivans au moment de sa mort que sept des sénateurs qu’il avait inscrits pendant qu’il était censeur. Il y eut un intervalle de 46 ans entre le premier et le sixième consulat de Valérius Corvinus, qui mourut centenaire ; il obtint vingt et une fois la chaise curule, ce qui n’est arrivé à aucun autre. Lors du dénombrement opéré sous l’empereur Claude, un certain Fullonius de Bologne se fit inscrire comme ayant 150 ans, et il établit la vérité de cette assertion par la confrontation des registres et d’autres preuves qu’il donna de son existence. Selon la chronique d’Apollodore, Ctésibius mourut, en se promenant, à l’âge de 124 ans. Le plus savant des Romains, Térentius Varron, a fourni une longue carrière : « quoiqu’il eut vécu cent ans, dit Valère Maxime, ses années ne dépassèrent pas le nombre de ses écrits. » Lucien accorde aussi un siècle d’existence à Cléanthe d’Asson, disciple de Zenon, à un historien nommé Hiéronyme, et à Demonax de Chypre, philosophe cynique. On cite également dans les temps antiques plusieurs exemples de femmes centenaires. Térentia, femme de Cicéron, vécut 103 ans, et Clodia, femme d’Ofilius, 115, après avoir été quinze fois mère. La mime Lucceia remplit un rôle à l’Age de 100 ans, et aux jeux célébrés pour le rétablissement de la santé d’Auguste, une autre actrice, Galeria Copiola, reparut sur le théâtre, sous le consulat de Poppeius et de Sulpicius, dans sa cent quatrième année, quatre-vingt-onze ans après son premier début, qui eut lieu sous le consulat de Marius et de Carbon. Pline rapporte encore que dans le dénombrement fait sous la censure de l’empereur Vespasien et de son fils, il se trouva à Parme trois citoyens qui déclarèrent 120 ans, et deux 130. Il y en eut auprès de Plaisance un de 150, un de 131, quatre de 120, et six de 110. La huitième