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de profonds étranglemens, savoir, la tête, la poitrine ou thorax, et le ventre ou abdomen. La tête est petite et porte en avant deux longues cornes mobiles ou antennes, articulées, terminées en massue, et dont il n’existait aucune trace dans la chenille. Les petits yeux simples existent toujours, mais de plus on trouve de chaque côté une grosse masse arrondie, à surface comme treillissée. Ce sont les yeux composés, dont chaque facette est un œil véritable, ce qui, d’après les observations de plusieurs naturalistes, porte à trente mille environ le nombre des organes de vision. La bouche, qui ne doit plus ni couper ni mâcher, mais seulement sucer, s’est appropriée à sa destination nouvelle. A peine découvre-t-on quelques vestiges des lèvres supérieure et inférieure, ainsi que des mandibules. Les mâchoires se sont prodigieusement allongées; la corne qui les revêtait a disparu, et des muscles extenseurs et fléchisseurs se sont développés dans leurs parois. Chacune d’elles présente intérieurement un canal où pénètrent des nerfs et des trachées, et sur sa face interne une gouttière profonde. En s’appliquant l’une à l’autre, en réunissant exactement les bords de leurs gouttières, les mâchoires forment une sorte de tube aussi long que le corps entier, et qui se continue avec la bouche. Naguère instruments de mastication, elles se sont changées en une trompe que l’insecte enroule ou déroule à son gré, qui lui permet d’aller jusqu’au fond du calice chercher et aspirer le suc des fleurs comme avec un chalumeau.

La poitrine ou thorax porte les pattes et les ailes. Les premières répondent aux pattes écailleuses de la chenille, mais on sait combien peu elles leur ressemblent. Autant celles-ci étaient courtes et massives, autant celles du papillon sont fines et déliées. La composition en est aussi bien différente. On y reconnaît cinq parties distinctes, et la dernière, le tarse, est elle-même composée de cinq articles et d’une paire de crochets. Les ailes, au nombre de quatre, sont attachées par paires sur les côtés du dos. Chacune d’elles s’articule avec les parties solides du thorax par l’intermédiaire d’une chaîne de pièces cornées, qui, réunies par de forts ligamens et munies de muscles puissans, permettent k cette rame aérienne de déployer autant de souplesse que de force dans les mouvemens. De cette base partent en divergeant quatre nervures principales, qui se ramifient bientôt, et, comme autant de baguettes cornées, soutiennent les membranes alaires. Malgré leur solidité, ces nervures sont creuses et renferment des trachées ou canaux aériens, qui atteignent ainsi jusqu’à la marge de l’organe. Deux membranes, d’une finesse extrême et d’une transparence parfaite, collées l’une à l’autre, tapissent les nervures en dessus et en dessous. C’est sur elles que sont implantées, comme les plumes dans la peau de l’oiseau, les petites