Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 10.djvu/625

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de 50 mille livres de rentes dans le service du roy d’Espagne. » Au surplus la nouvelle était fausse, car le comte de Solre fut fait prisonnier dans l’ouvrage couronné à l’assaut, en même temps que le comte de la Tour-Taxis.

Ce même jour, que se passait-il en ville? « Le 10, environ à trois heures du matin, il arriva un courrier de Bruxelles avec une lettre écrite le 3e de mars par M. le duc d’Aremberg à M. le marquis de Richebourg, qui contenoit l’ordre d’exhorter les soldats et bourgeois à se défendre généreusement, avec la promesse d’un prompt et puissant secours. Sur les trois heures du matin, le comte de la Tour-Taxis parvint aussi à pénétrer avec trois autres officiers de distinction. Un trompette de M. de Louvois étant venu parler à M. le commandant, il ne voulut pas l’écouter. » Il s’agissait d’une réclamation qui semblerait singulière aujourd’hui, mais qui, à ce qu’il paraît, était dans les usages militaires de ce temps-là. Un courrier porteur de dépêches était attendu au camp du roi, on craignait qu’il n’eût été enlevé par l’ennemi, et Louvois écrivait en même temps au gouverneur de Valenciennes et à don Pedro Zavala, commandant à Mons, pour avoir des nouvelles de son courrier et prier qu’on le lui renvoyât[1].

Tout marchait à souhait, les troupes de l’attaque étaient logées sur la contrescarpe, les défenses des deux demi-lunes en avant de l’ouvrage couronné avaient été si bien ruinées par les feux courbes de M. Du Metz, que les assiégés, retirés dans cet ouvrage, avaient renoncé à le garder. Quant aux frises et aux palissades du fossé, elles étaient hachées, et les talus des faces de la couronne (non revêtue d’ailleurs, comme on sait) avaient, grâce à l’éclat des projectiles creux de l’attaque, perdu une bonne partie de leur raideur. Un conseil de guerre fut tenu, présidé par le roi, où l’on délibéra sur ce

  1. Des conventions guerre ou cartels analogues avaient été échangés par d’autres motifs, ainsi que le témoigne la note suivante de Louvois :
    « Mémoire de passeports que M. Lefébure est prié de demander à M. le duc de Villa-Hermosa :
    « Vingt passeports pour les pourvoyeurs et marchands de vin de la maison du roy, chacun pour deux chariots, six chevaux de bat, six bas officiers de la maison de sa majesté, et dix cavaliers d’escorte, pour pouvoir aller, tant de jour que de nuit, de l’armée dans toutes les villes et plat pays de l’obéissance du roy, et par le plat pays d’Espagne; lesdits passeports bons pour dix mois.
    « De la même teneur pour les pourvoyeurs et marchands de vin de Monsieur, etc.
    « Six passeports pour les pourvoyeurs de M. le marquis de Louvois, chacun pour un chariot, quatre chevaux de bat, quatre valets à cheval et six cavaliers d’escorte.
    « Deux pour M. de Saint-Pouanges, pour un chariot, deux chevaux de bat, deux valets à cheval et six cavaliers d’escorte. » — Du 3 mars1677.
    Les chefs des armées belligérantes se faisaient, comme on voit, de petites galanteries, tout en échangeant des boulets de canon.