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de l’esprit d’entreprise qui ait été donné encore parmi nous. Cette sous-race a remporté à plusieurs reprises le premier prix des moutons gras au concours de Poissy, pour des animaux arrivés à tout leur développement avant l’âge de quatorze mois ; elle commence à se répandre dans le centre, qui est son domaine naturel, car elle est sortie de brebis berrichonnes avec des béliers anglais.

Les porcs étaient peu nombreux, relativement aux autres espèces. On en comptait environ 60 en tout, dont douze appartenant à des races nationales, le reste en races anglaises. En France, comme en Angleterre, le porc n’est absolument élevé que pour sa viande ; ni le travail, ni le lait, ni la laine, ne viennent compliquer la question, animal propter convivia natum. Les différences de climat et de fertilité ont elles-mêmes peu d’importance, car le porc vit peu au grand air, il doit être surtout nourri à l’étable ; rien ne s’oppose donc sérieusement à l’adoption pure et simple des races anglaises par nos plus petits cultivateurs. Leur supériorité est plus manifeste encore que pour les autres espèces animales ; tout s’y trouve, la qualité comme la quantité, et quand on a vu une fois un essex, un new-leicester, un coleshill, un hampshire, il n’est plus permis d’hésiter. Autant il me paraît prudent de bien étudier avant d’entreprendre un croisement quelconque pour les bœufs et les moutons, autant l’avantage me paraît immédiat et évident pour les porcs, tant nos races sont encore défectueuses pour la plupart.

Ceci commence à être compris, car les prix, même pour des animaux de race anglaise, ont été généralement obtenus par des Français, bien que des éleveurs anglais eussent aussi concouru. Je ne connais pas les porcheries de la plupart de nos éleveurs primés, mais j’ai vu celle récemment construite par l’un d’eux, M. Allier, directeur de Petit-Bourg, et je puis affirmer qu’il n’y a rien de mieux en Angleterre. Il est bien à désirer que cet exemple se propage, car de toutes les spéculations agricoles il n’en est pas de plus simple, de plus sûre, de plus facile ; la viande de porc entre déjà pour un tiers dans notre alimentation nationale.

Quelques boucs et chèvres appartenant aux races d’Angora et de Cachemire figuraient à côté des moutons. C’est sans doute une louable entreprise que d’essayer de naturaliser ces élégantes espèces, mais nous avons déjà chez nous un type précieux dont on ne parle pas assez : c’est tout bonnement la chèvre laitière, l’ancienne Amalthée, qui peut bien nourrir aujourd’hui les hommes, puisqu’elle nourrissait autrefois les dieux. Ce n’est pas sans raison que les anciens avaient fait d’une corne de chèvre la corne d’abondance ; de tous les animaux domestiques, celui-là est peut-être le plus productif. Outre qu’il fournit la matière première d’une de nos industries de luxe, la ganterie, il produit en abondance des fromages recherchés.