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profond mathématicien qui, tout en prenant Newton pour guide, marche comme Lagrange avec le raisonnement, qui donne la clarté, et le calcul, qui donne la force. Il y a quelques mois, lord Brougham a publié à part cette belle étude sur le livre de Newton en collaboration avec un jeune gradué de l’université de Cambridge, M. E. J. Routh. La participation du noble lord à cette nouvelle édition n’est point purement nominale, comme on aurait pu le présumer, et sérieusement il est à regretter que les mathématiques n’aient pas été une occupation professionnelle pour le célébre chancelier du royaume-uni. On trouve dans ce volume, sur la métaphysique des forces et sur l’historique des diverses parties de la mécanique céleste, d’utiles notions qu’on chercherait vainement ailleurs. L’auteur pense et fait penser. Il est toujours positif, clair et profond. Je me hasarderai à dire qu’une étude pareille, faite d’après un plan bien arrêté, sur tous les écrivains qui ont fait avancer la science du système du monde, si elle était accomplie par le collaborateur du noble lord et suivant la méthode de celui-ci, serait un précieux présent fait au monde astronomique. On voit du reste que la comparaison des méthodes et la science des résultats obtenus par chaque auteur sont familières aux collaborateurs de l’Analytical Wiew. À l’étonnement que j’eus, il y a quinze ans, de trouver dans lord Brougham un mathématicien sous la toge d’un homme d’état, s’est joint, il y a quelques mois, celui de le retrouver dans toute son énergie primitive. Longue vie au noble lord et félicitations sur son dernier ouvrage !

Peut-être que sans la récente publication du livre de lord Brougham, je ne me serais pas encore décidé à terminer la présente étude, où il m’a fallu choisir, comme on le pense bien, entre un grand nombre d’exemples de l’emploi des mathématiques transcendantes. La théorie des probabilités, la mécanique rationnelle, la physique, auraient pu m’offrir de belles applications ; mais ces objets sont moins généralement connus que les astres, et m’auraient forcé de supposer ou de rappeler un plus grand nombre de notions préliminaires. En somme, j’ai dit ce que je voulais dire, et pour toute excuse vis-à-vis du lecteur, je lui suggérerai ce conseil que donne Jean-Baptiste Rousseau pour abréger les écrits peu amusans :

Rendons-les courts en ne les lisant point !


BABINET, de l’Institut.