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des œufs bien caractérisés par l’existence des trois sphères concentriques dont nous avons parlé dans la première partie de cette étude. Ces œufs se transforment en larves, d’abord assez peu différentes de celles des hermelles ou des tarets. Leur corps ovalaire, d’apparence entièrement homogène, est couvert de cils vibratiles, et présente en avant une petite dépression. Elles nagent pendant quelque temps avec beaucoup de vivacité, à la manière des infusoires, auxquels elles ressemblent de manière à tromper quiconque bornerait la ses observations.

Cette première phase de la vie chez les méduses dure environ quarante-huit heures. Les mouvemens se ralentissent alors, et la jeune larve semble fatiguée. À l’aide de la petite dépression qui a été signalée, elle s’attache à quelque corps solide. Un mucus épais sécrété par elle s’étend en un large disque qui la fixe solidement[1]. Alors elle s’allonge ; son pédicule se rétrécit, son extrémité libre se renfle en massue. Bientôt une ouverture se montre au centre de cette extrémité et laisse voir une cavité interne ; quatre petits mamelons s’élèvent sur les bords, grandissent et deviennent autant de bras ; d’autres ne tardent pas à paraître et à s’allonger à leur tour. L’infusoire de tout à l’heure s’est changé en polype, et c’est ce dernier que Saars avait décrit d’abord sous le nom de scyphistoma.

Sous sa forme polypiaire, la méduse jouit de toutes les propriétés des véritables représentans de ce groupe. Elle se multiplie entre autres par bourgeons et par stolons[2]. Tantôt des bourgeons naissent sur un point du corps, et ne tardent pas à reproduire l’animal souche, tantôt ils s’allongent en tige grêle qui rampe sur le sol jusqu’à une certaine distance, et sur laquelle poussent des tubercules qui à leur tour deviennent des scyphistoma, tous ressemblant à autant de cornets largement évadés, courts, et dont le bord serait garni de vingt ou trente filamens grêles et mobiles. Chacun des derniers venus peut d’ailleurs se conduire comme les premiers, et donner naissance à de nouvelles générations qui étendent de plus en plus la colonie.

La méduse vit pendant quelque temps sous cette forme ; puis un cornet acquiert une longueur triple ou quadruple, et en même temps il devient cylindrique. Une première dépression circulaire se forme

  1. J’ai reproduit ici l’opinion de Saars, mais il est bien probable que ce prétendu mucus est une véritable expansion sarcodique analogue à celles qu’on a observées dans le développement d’un grand nombre d’autres animaux inférieurs et des éponges elles-mêmes. Voyez, sur la nature da sorcode, la première partie de cette étude, Revue des Deux Mondes, livraison du 18 avril 1855.
  2. On appelle stolons ou jets ces espèces de branches grêles qui partent du bas de la tige d’une plante et qui, prenant racine à quelque distance de leur point de départ, produisent une plante nouvelle. Le fraisier nous offre un exemple connu par tout le monde de ce mode de multiplication.