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ayons étudiés, et qu’ils s’accompagnent de circonstances toutes nouvelles.

Un Français auquel on n’a pas suffisamment rendu justice hors de notre pays, le docteur Pineau, est, croyons-nous, le premier qui soit entré dans cette voie de recherches hérissée de difficultés de tout genre. Dès 1845, il publiait ses premières observations sur le développement et les métamorphoses des vorticelles. Il venait sur le même sujet en 1848[1], de Rouen, confirmait en partie ces résultats et reconnaissait chez les infusoires plusieurs modes de génération[2]. Quatre ans après, un élève d’Ehrenberg, M. Stein, faisait connaître les résultats de ses propres expériences, rectifiait et complétait sur quelques points notre compatriote, mais, sous d’autres rapports, n’allait pas même aussi loin que lui[3].

De cet ensemble de travaux, on peut conclure avec certitude que bien des états transitoires ont été pris chez les infusoires, comme chez les polypes, pour des états permanens, et qu’on a multiplié outre mesure les espèces, faute de savoir quelles phases chacune d’elles doit traverser pour atteindre à sa constitution définitive. Ainsi M. Pineau a vu les monades prendre d’abord la forme d’une actinophrys c’est-à-dire présenter un corps arrondi, d’où sortent, comme autant de rayons, des prolongemens très grêles de matière vivante et lentement contractile[4]. Au bout de quelque temps, un pédicule pousse au-dessous de ces petits êtres, qui se trouvent peu à peu élevés, prennent la figure d’une poire portée sur une longue queue, s’entourent d’expansions rayonnantes de plus en plus nombreuses, et deviennent ainsi ce que les naturalistes nomenclateurs ont appelé des acinètes. Alors la partie supérieure de la poire s’affaisse pour ainsi dire, se creuse d’une cavité circulaire et échancrée, sur le bord de laquelle apparaissent des cils vibratiles ; les expansions rayonnantes rentrent dans la masse commune ; la cavité supérieure se change en un large rebord ; un orifice buccal se montre ; un cordon très contractile s’organise dans le pédicule, et l’acinète lui-même est devenu une de ces élégantes vorticelles semblables à autant de petites urnes vivantes qui flottent à l’extrémité d’un fil animé prêt à

  1. Annales des Sciences naturelles, troisème série, 1845, 1848.
  2. L’Institut, 1849.
  3. Recherches sur le développement des vorticelles comparé à celui des grégarines. Ce mémoire, publié en 1852 dans le Zeitschrift fur Wissenschaftliche Zoologie, a été traduit en anglais et en français dans les Annales des Sciences naturelles, 1852. Les premières recherches de Stein remontent à 1849.
  4. M. Pineau, partisan de la génération spontanée, a cru que ces actinophrys provenaient de la transformation immédiate des matières en putréfaction en animaux vivans. C’est un des points sur lesquels Stein l’a combattu avec raison.