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considérable, ou en d’autres termes qu’ils sont plus pesans. Pour les maintenir, l’action constante d’une force inverse est donc nécessaire. Descartes croyait à une matière subtile qui tourbillonnait au tour de la terre, et qui, animée elle-même de la force centrifuge, tendait à s’élever et à repousser sur le sol tous les corps solides, de même que l’eau qui pèse de haut en bas tend à repousser en sens inverse les substances qu’on y plonge. D’autres ont cru à une force de magnétisme, quelques-uns à la pression de l’atmosphère, quoi que l’air soit si éloigné de produire la gravité, qu’il diminue constamment le poids des corps. Toutes ces théories n’ont pas besoin d’être réfutées. Il saute aux yeux que si l’une d’elles était vraie, les corps qui tombent se dirigeraient vers l’axe de la terre, et non vers le centre. On a mesuré cette force de la pesanteur ou gravité, et on l’a trouvée proportionnelle à la masse des corps : elle agit également sur tous, et si toute matière ne paraît pas tomber avec la même vitesse, cela tient à ce que le vent la soulève parfois lorsqu’elle est légère, ou que l’air la soutient. Dans le vide, la chute de tous les corps est également rapide. Pour tous, l’espace parcouru est le même dans la première seconde, puis s’accroît dans la deuxième, suivant les lois du mouvement uniformément accéléré découvertes par Galilée. À mesure qu’on approche du centre de la terre, cette force augmente ; lorsqu’on s’en éloigne, elle diminue, et les expériences démontrent que la pesanteur ou gravité est proportionnelle à la masse des corps et en raison inverse du carré de leur distance au centre de la terre.

Nous avons déjà raconté l’anecdote de la pomme qui, en tombant, fit réfléchir Newton. Ayant remarqué que les corps étaient attirés vers le centre de la terre par une force constante qui dépendait de leur quantité de matière et de leur distance à ce même centre, que la gravité agissait également sur toute matière, qu’elle n’était pas sensiblement moindre sur le sommet des hautes montagnes, qu’elle affectait l’air lui-même comme le démontre le baromètre, il se demanda s’il était possible qu’à une certaine distance de la terre cette force cessât tout à coup. La réponse était facile, et il est remarquable que la plupart du temps, dans les sciences, la difficulté est de poser la question et non de la résoudre. Il conclut donc que le principe de la gravité était un principe général s’étendant jusqu’aux cieux, puisque des superstitions et des préjugés vulgaires pouvaient seuls conduire à penser que la substance des corps célestes fût d’une autre nature que les matières connues, ce qui eût été d’ailleurs en contradiction avec toutes les analyses des aérolithes. Un corps placé dans la lune et la lune elle-même doivent donc peser vers la terre et tendre vers son centre. La cause qui empêche la lune de s’élancer hors de son orbite et lui fait suivre une courbe au lieu de la ligne