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par des droits exagérés, il est encore un autre abus que subit le public : c’est que les producteurs nationaux se coalisent pour n’améliorer leurs procédés qu’à leurs heures, ou, en supposant qu’ils les aient améliorés, pour fixer de la façon la plus arbitraire les prix que le public aura à payer. Cette entente cordiale contre la bourse du public consommateur est parfaitement aisée dans les industries qui ne comptent qu’un petit nombre d’ateliers. Elle devient possible dans les autres, sinon facile, aujourd’hui que la tendance aux fusions, est si fortement prononcée. Par le moyen des comités qui se sont constitués dans la plupart des industries, sous prétexte de la défense du travail national, ce concert entre les producteurs contre l’intérêt public est pratiqué même dans les industries ou Il existe un grand nombre d’établissemens. On en est venu à ce point, dans quelques-unes, qu’on notifie périodiquement au public qu’il a été convenu, dans une réunion tenue en telle ville, que désormais les prix, seraient tels ou tels. Contre de pareils coups d’autorité il n’y a de refuge que dans la concurrence extérieure. Qu’on tempère, s’il le faut l’action de l’industrie étrangère par des droits, mais du moins qu’on ne laisse pas plus longtemps le public, désarmé contre des exigences injustifiables, et à la merci de ces monopoles.

À titre de consommateurs, les populations ouvrières des champs et des villes sont victimes de ses combinaisons, que provoque ou favorise le système prohibitif. Elles sont ainsi dans la même situation que si leurs salaires ; avaient été diminués. Ce n’est pas tout cependant : il est facile de constater aussi que le régime prohibitif agit directement sur les salaires, pour en empêcher la hausse naturelle ou pour la restreindre.

Pour être dans le vrai en effet, il faudrait renverser le raisonnement de M. Mimerel, et dire : L’amélioration du sort des ouvriers a suivi d’une manière générale le perfectionnement des procédés et des méthodes, il est dans la nature des choses qu’elle le suive encore. Donc, pour, procurer, à l’ouvrier des conditions d’existence meilleures, il faut donner à l’industrie française un nouveau degré d’avancement. Il faut la placer dans une situation telle qu’elle n’ait plus rien à envier à personne en fait de progrès. À cet effet, il ne manque plus rien à l’industrie française, si ce n’est le stimulant de la concurrence étrangère. Forte comme elle est, c’est un aiguillon dont l’atteinte ne peut la blesser, et dont au surplus rien n’empêche de modérer l’action par des droits qui n’auraient pas besoin d’être élevés. Nous tous donc qui nous préoccupons d’améliorer le sort des ouvriers, provoquons l’intervention, convenablement tempérée, de la concurrence étrangère. Par là, en outre, on fera cesser cette organisation de monopole qui, lors même que les prix de revient ont été fortement diminués par le perfectionnement des procédés, maintient