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dans l’exposition universelle de 1851, à Paris dans celle de 1855. Dans l’un et l’autre de ces deux grands concours, il n’aura pas manqué d’interroger ses collègues au sujet de cette question des douanes qui le préoccupe tant. Il a été en mesure d’acquérir des notions précises sur les effets de la réforme en Angleterre, sur l’opposition violente qu’y avaient faite d’abord certains intérêts des plus considérables, tels que celui des propriétaires fonciers, celui des armateurs maritimes et des constructeurs de navires, celui des exploitans de mines de cuivre, gens très puissans de l’autre côté du détroit, qui prétendaient, comme chez nous les maîtres de forges, que leur industrie était perdue, si on laissait entrer librement le produit des exploitations étrangères. Moyennant des efforts qu’en tout pays on est en droit, non-seulement de demander des producteurs, mais encore de leur commander, ces industries, qui étaient bien autrement menacées par le bill de sir Robert Peel que les manufacturiers ne l’étaient chez nous par le projet de loi portant retrait des prohibitions, se sont placées au-dessus de toute atteinte, et aujourd’hui elles sont les premières à rire de leurs frayeurs passées, les premières à proclamer l’excellence du principe de la liberté commerciale. M. Mimerel a pu constater tout cela par lui-même. Il a pu savoir par les jurés du continent européen que dans tous les pays où le tarif avait été modifié dans le même esprit libéral et progressif, le résultat avait été le même, fort avantageux pour l’intérêt général, inoffensif ou même profitable pour les intérêts des industries qui, au premier abord, avaient pu se croire compromises, à la condition qu’elles fissent ce dont nous sommes tous tenus ici-bas, preuve d’activité et d’intelligence. C’est ce qu’il a pu vérifier pour les filatures de coton du Piémont, par exemple, qui aujourd’hui prospèrent plus que jamais et se félicitent du changement que M. de Cavour a apporté au système commercial de sa patrie.

Même sans prendre aucune information à Londres ou à Paris, M. Mimerel avait un autre moyen de s’édifier, au moins partiellement, sur ce qui s’est passé en Angleterre. Il est membre du conseil-général du Nord ; il l’est entouré de propriétaires et de manufacturiers qui, profitant de la réforme de sir Robert Peel, expédient leurs produits en Angleterre, et de représentans des ports dont les navires, grâce à l’abolition des anciennes lois sur la navigation par les successeurs de sir Robert Peel, fréquentent les ports anglais. Il ne peut donc ignorer que, par la réforme douanière de sir Robert Peel, la France a obtenu, sans réciprocité, des facilités inespérées pour placer ses marchandises de l’autre côté du détroit, car en Angleterre les droits sur les tissus de laine et sur les tissus de coton ont été complètement supprimés, de même les droits sur le bétail ; les droits sur