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là, si nos souvenirs sont fidèles, le nom classique de la chose) égal au nombre de petits camarades réunis avant lui dans la classe.

Ce système de terreur, qui paralyse l’intelligence des élèves, exerce de plus une influence pernicieuse sur leur moralité. Pour s’attirer les bonnes grâces du sévère guruh mahashaï, les pauvres enfans se soumettent en victimes résignées à tous ses caprices, et n’hésitent point à voler à la maison paternelle du riz, du tabac, de l’argent même, qu’ils offrent en présent à leur terrible mentor. Ce n’est pas que les jeunes Bengalis, en véritables fils d’Adam, ne tentent à certains jours de prendre leur revanche en semant d’épines la natte du professeur, ou en assaisonnant d’épices le tabac de son houkah. Quelquefois même ils le poursuivent dans l’ombre à coups de pierres, ou, vendetta plus terrible encore, passent processionnellement à la nuit tombante auprès de sa cabane, chantant en chœur des hymnes improvisés où ils promettent force présens à la déesse Kali, si, par son intervention, une mort prochaine vient bientôt les délivrer de leur impitoyable tyran.

Nous n’avons parlé jusqu’ici que des écoles élémentaires de bengali et d’indoustani ; il est temps de dire quelques mots des établissemens de la communauté native, où l’on donne un enseignement d’un ordre plus élevé. Ces établissemens se divisent en trois catégories distinctes : les écoles de persan, les écoles d’arabe, et les écoles de sanscrit.

Le persan est le langage des sciences et de la véritable littérature orientale, il se lie intimement aux souvenirs de gloire et de puissance de la population mahométane de l’Inde. De plus, sous l’influence du système politique de statu quo qui a prévalu si longtemps dans les conseils de l’honorable compagnie, le persan est demeuré exclusivement jusqu’à ces derniers temps le langage des affaires, des cours et des tribunaux. L’on s’explique donc facilement, à tous égards, que ce langage soit très répandu parmi la population native, sans distinction de croyances religieuses. Le programme d’enseignement des écoles de persan comprend la lecture, l’écriture, le mécanisme grammatical du langage, la composition, l’étude des poètes, etc. Si les livres imprimés n’y sont point toujours employés, on s’y sert universellement d’ouvrages manuscrits dont la morale est de beaucoup supérieure aux légendes informes et aux sentences impures en usage dans les écoles de bengali et d’indoustani. L’enseignement de l’école persane emploie en moyenne de dix à douze ans : les élèves commencent leurs études vers l’âge de huit ans et les terminent de vingt à vingt-deux. Les maîtres de persan, comme instruction, position sociale, tiennent un rang plus élevé que leurs confrères ; aussi les honoraires, fruits de leurs travaux, sont-ils plus