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considérations que le cabinet de Bruxelles s’est décidé. D’un côté, il n’a pas voulu braver jusqu’au bout une effervescence toujours dangereuse et menaçante pour la paix publique ; d’un autre côté, il pense que les moyens dont il dispose légalement dans l’intérêt des pauvres lui suffisent, au moins provisoirement, en attendant que le calme des esprits permette de travailler utilement à une législation nouvelle et définitive. Le gouvernement belge, on le voit, s’est montré en ces conjonctures difficiles véritablement modère : il a donné l’exemple de la prudence en refusant de prolonger une lutte où la victoire elle-même eût été peut-être funeste pour le pays ; mais si le cabinet de Bruxelles a fait ce qu’il a pu, ce qu’il devait pour conduire heureusement la Belgique à travers les périls de la situation la plus compliquée, les faits qui ont contribué à créer cette situation ne restent pas moins déplorables. Cette irruption soudaine de la force n’a pas moins eu pour effet de jeter un trouble momentané dans le jeu naturel des institutions, premier exemple de ce genre dans les annales politiques de la Belgique. Et ce qui prouve combien cette crise a été pleine d’anomalies et de difficultés, selon le langage du gouvernement, c’est que le roi Léopold lui-même, accoutumé à montrer la plus extrême circonspection, s’est cru obligé de parler directement au pays dans une lettre publique adressée au ministre de l’intérieur. Le roi Léopold rappelle à tous la modération, la réserve dans la pratique des institutions libres ; il montre la nécessité de s’abstenir de soulever ces questions irritantes qui ne servent qu’à allumer la guerre dans les esprits. C’est qu’en effet malheureusement la Belgique est livrée à des partis extrêmes qui se font une guerre permanente, passionnée, acerbe, et qui semblent toujours vouloir se détruire mutuellement, en fondant, selon le langage du roi, la suprématie d’une opinion exclusive sur l’autre. C’est entre ces deux partis que le ministère a pris position. Bien que catholique, il ne partage pas tous les emportemens d’une fraction de son parti ; libéral sincère, il ne veut pas suivre des libéraux qui ressemblent trop souvent à des révolutionnaires. Sa mission n’est point facile, surtout aujourd’hui, au milieu de l’effervescence des passions contraires ; mais en restant fidèle à une politique modérée, il est dans la voie juste, et il sert les plus vrais, les plus sérieux Intérêts de la Belgique.

Il y a toujours en Hollande une question des plus graves, depuis longtemps livrée à toutes les polémiques, et qui ne cesse d’être agitée par les partis : c’est celle de l’instruction primaire. Cette épineuse question ne va-t-elle pas enfin être résolue ? Elle est tout au moins sur le point de reparaître dans le parlement. Le gouvernement a répondu aux remarques qui lui avaient été adressées par les bureaux de la seconde chambre, et il a introduit dans la loi quelques-unes des améliorations qui lui avaient été indiquées, notamment en ce qui touche la subdivision de l’enseignement primaire en deux catégories, l’une se bornant à l’instruction la plus élémentaire, l’autre embrassant des connaissances un peu plus larges. Le gouvernement d’ailleurs a refusé de céder à des réclamations d’un autre genre. Il persiste dans ses propositions primitives au sujet de la faculté d’accorder un subside à l’enseignement séparé des différens cultes, ce qui ne satisfait pas plus les partisans des écoles séparées que l’opinion dont M. Groen van Prinsterer est le repré-