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influence qu’exerce la force de concentration de la richesse et des possessions territoriales.

« L’accroissement du nombre des propriétaires, la création de nouveaux produits et de nouvelles richesses, l’accélération du mouvement des capitaux, voilà (ainsi s’exprimait en 1814 la chambre des pairs dans une adresse au roi) ce que l’on a vu naître au milieu des orages de la révolution. » Ces paroles peuvent s’appliquer encore à l’état actuel des choses ; l’expérience d’un demi-siècle n’a fait que confirmer les bienfaits amenés par la division du sol : elle a fait justice des appréhensions chimériques ou passionnées que faisait naître ce grand mouvement social. M. Droz a fort bien répondu à ceux qui redoutaient pour l’avenir un morcellement de la propriété porté à un tel point qu’il en résulterait l’indigence universelle. « Deux causes, disait-il, — l’intérêt du riche et l’intérêt du pauvre, — s’opposeront toujours à l’excès de subdivision redouté par des observateurs superficiels… Il y a une attraction qui fait graviter les champs épars vers les corps de ferme… Une trop grande division des propriétés peut momentanément exister sur tel point d’un état ; mais ce mal, que le temps fait disparaître et qui trouve des compensations, est à peu près nul dans la masse des intérêts sociaux. »

En 1825, le ministre de la justice, proposant de modifier notre code civil, rappelait le spectacle qu’offrait depuis 1815 le sol de la France. « Sur le nombre des taxes qui partageaient, disait-il, le sol de la France, combien s’élevaient jusqu’à 1,000 fr. ? 17,000. — Combien s’élevaient jusqu’à 500 fr. ? 40,000. — Combien ne s’élevaient pas au-dessus de 20 fr. ? 8 millions… Depuis 1815, l’état et la distribution du sol ont changé ; mais de quelle manière ? Le nombre des taxes de 20 fr. a augmenté d’un neuvième, celui des taxes de 500 fr. a diminué d’un tiers. » Ainsi donc en 1825 le gouvernement estimait à 9 millions le nombre des cotes inférieures à 20 fr., et à 26,000 environ le nombre des cotes supérieures à 500 fr., en y comprenant les centimes additionnels. Or en 1835 le nombre des cotes de 20 fr. et au-dessous n’atteignait pas le chiffre de 8 millions 1/2 (8,471,655), et le nombre des cotes de 500 fr. et au-dessus s’élevait à 46,557. — En 1842, un relevé analogue donne pour les cotes de 20 fr. et au-dessous le nombre de 8,873,951, et pour celui des cotes de 500 fr. et au-dessus, 55,208. — Dans l’intervalle de sept années, tandis que le premier chiffre ne s’était pas accru de 5 pour 100, le second avait augmenté de plus de 16 pour 100.

Sans doute les petites cotes se fractionnent, mais le mouvement devrait être bien plus accéléré à raison du nombre même de ces cotes : le contre-poids se rencontre dans les lumières du cultivateur et dans