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deux, l’un de 700 pages, l’autre de près de 1,000. Il s’est donné pour collaborateur M. Newmarch, qui est connu par des écrits financiers et statistiques d’un grand intérêt parmi lesquels je pourrais citer l’Histoire des emprunts de Pitt. La majeure partie des deux volumes que je signale aujourd’hui est de la plume de M. Newmarch ; mais M. Tooke déclare avoir revu le tout, et en assume la responsabilité.

La période à laquelle se réfèrent ces deux nouveaux volumes a été marquée par de grandes nouveautés industrielles, telles que la découverte et la mise en exploitation des mines d’or de la Californie et de l’Australie. Elle a vu se dérouler les conséquences de la grande réforme commerciale de sir Robert Peel. Elle a été témoin des résultats fournis par les chemins de fer, dont l’Angleterre est si bien sillonnée. Elle a assisté à la mise en pratique, dans des circonstances fort variées, des lois de 1844 et de 1845 sur la banque d’Angleterre et les autres banques du royaume-uni. Ces différens faits sont méthodiquement décrits par MM. Tooke et Newmarch.

De tous ces sujets, la réforme commerciale est peut-être celui qu’ils ont traité avec le plus de supériorité. Ils l’ont pris depuis l’origine, c’est-à-dire depuis la paix qui termina la terrible lutte avec la république française et l’empire en 1815. M. Tooke a eu à cœur de s’en charger lui-même. Les brillans succès qu’a obtenus ce revirement de la politique commerciale de l’Angleterre lui rappellent les combats de sa jeunesse et ces temps ingrats où, quand on parlait de la liberté du commerce, on obtenait à peine la froide approbation de quelques esprits d’élite, mais où la majorité du parlement, abusée par le mirage de la doctrine protectioniste, dominée par l’intérêt privé de la propriété territoriale et par les prétentions aveugles d’un grand nombre de manufacturiers, répondait par une négative désespérante aux suggestions de ses membres mieux informés, à celles de M. W. W. Withmore, par exemple, qui, dès 1825, tout grand propriétaire qu’il était, demandait la libre entrée des céréales. Dès ce temps-là, et même auparavant, M. Thomas Tooke était entré dans la lice. C’est de sa plume qu’est sortie la fameuse pétition présentée au parlement le 8 mai 1820, au nom des principaux commerçans de la Cité de Londres, par M. Alexandre Baring, depuis lord Ashburton, avec l’assentiment, assez froid cependant, du cabinet, que dirigeait à cette époque lord Liverpool, et dont lord Castlereagh était membre. Cette pétition, qui est aujourd’hui justement considérée comme un des précieux documens de l’histoire de la moderne Angleterre, se recommande en ce qu’elle offre un excellent résumé des principes de l’économie politique sur la matière. Elle insiste particulièrement sur ce que la liberté du commerce est en soi un grand bien, et qu’il est avantageux de la pratiquer sans attendre la réciprocité des autres nations. Si elle n’exerça pas une influence immédiate