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orientaux de ce bassin du Pacifique, il ne le cédera en rien aux rives norvégiennes :

… Ubi Scandia dives
Halecas totum mittit piscosa per orbem,

« où la riche Scandinavie pêche des harengs pour l’univers entier. » Les érudits, pour poétiser le hareng, iront en chercher la mention dans Horace. Est-il un de nos hommes d’état qui puisse nous dire ce que sera le monde de l’humanité et de la civilisation en 1957 ?

M. Arago disait souvent que, d’après Napoléon Ier, la plus puissante de toutes les figures de rhétorique, c’est la répétition. Je ne me lasserai donc jamais de dire et de redire ce que j’ai tant de fois écrit, à savoir que la supériorité des climats du nord sur ceux du midi tient à ce que presque toutes les eaux tièdes du grand courant d’eau chaude des régions équatoriales remontent au nord, soit dans l’Atlantique par le gulfstream, qui donne à la Norvège les riches cultures qui ont fait l’admiration des observateurs de la Reine-Hortense en 1856, et à l’Orégon les géans du monde végétal, ces arbres de 100 mètres de hauteur. Jetez les yeux sur la carte de M. Duperrey, qui a découvert l’un des trois courans qui portent au sud les eaux chaudes de l’équateur. Voyez ces trois faibles courans, celui de la mer des Indes, celui du Pacifique sud, et celui de l’Australie, porter d’indigentes masses d’eau à peu de distance de l’équateur vers le pôle antarctique, tandis que les deux grands et énergiques courans de l’Atlantique et du Pacifique septentrional prennent au-delà de l’équateur même la masse presque entière des eaux du courant chaud qui fait la ceinture du monde intertropical, pour la verser dans notre hémisphère à des latitudes égales ou supérieures à celles du nord de l’Ecosse.

Comment le peuple des compilateurs, après tout ce que les mémoires originaux contiennent de documens sur la question de l’excès de température de l’hémisphère nord sur l’hémisphère sud, vient-il encore nous étaler le vieux bagage des opinions surannées relativement aux causes qui donnent à nos latitudes une immense supériorité de climat sur les latitudes méridionales ? On se plaint de nos jours de l’insuffisance de la critique littéraire : eh ! bon Dieu, que dirait-on de la critique scientifique, quand on voit les meilleurs esprits guidés par les ouvrages les plus accrédités ignorer où en est le monde de la science actuelle et répéter les échos de la science météorologique de 1800 ?

Ces préliminaires étaient indispensables pour bien faire comprendre l’importance de toutes études faites ou à faire sur notre bassin