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métal accomplie, il sera aussi facile de payer 2 livres sterl. d’impôt que 1 livre aujourd’hui. La réduction à moitié du lourd fardeau de la dette publique serait, selon toute probabilité, un argument puissant auprès d’une assemblée politique telle que le parlement, qui penche naturellement du côté où il voit un soulagement pour le contribuable, et qui, dans le cas actuel, trouverait des raisons considérables à faire valoir pour procéder ainsi.

Mais en regard de cet avantage, qu’il serait fondé par le droit strict à revendiquer pour les contribuables, le parlement devra mesurer la masse d’inconvéniens et même de périls pour la société qui résulterait nécessairement du maintien d’une monnaie en cours prononcé d’avilissement. J’ai indiqué quels seraient les changemens qu’apporterait à une multitude d’existences la baisse du métal dont la monnaie est faite ; il y aurait déjà, ce semble, de quoi épouvanter même un homme d’état doué de la fermeté qui distingue particulièrement les gouvernans de l’Angleterre et la nation anglaise, et pourtant aux généralités que j’ai présentées il est facile d’ajouter d’autres faits qui ressortent de la situation de la société britannique et de ses habitudes. Le rôle que jouent les fonds de l’état en Angleterre est extrêmement étendu. Les consolidés sont le placement d’une masse énorme de capitaux qui sont dignes de la sollicitude particulière du législateur. Tous les fonds qui sont dans les mains de fidéi-commissaires ou sous la sauvegarde de la cour de chancellerie, et qui composent par exemple la fortune d’une multitude de mineurs, sont placés dans la rente ou sur hypothèques, ce qui ici revient au même, je veux dire, court la même chance. Les dotations d’une foule d’églises, d’écoles, d’hôpitaux et d’institutions utiles en tout genre sont aussi dans les fonds de l’état. Dans un grand nombre de cas, les parts de propriété qu’un père laisse à ses enfans autres que l’aîné sont représentées, en vertu d’arrangemens de famille (family settlements), par une somme de monnaie dont l’aîné, devenu chef, reste dépositaire. Le nombre des personnes qui vivent d’une rente viagère, ou qui ont déjà fait des versemens de manière à en avoir une un jour, est pareillement très considérable chez nos voisins de l’autre côté du détroit. En général, l’assurance sur la vie, dont l’effet est d’assurer à telle ou telle personne une rente viagère dans telle ou telle éventualité, est usitée parmi les Anglais sur une échelle que nous ne soupçonnons pas en France. La conséquence est pourtant claire : ce seraient des milliers de milliers d’existences qui seraient troublées ; ce serait la constitution même de la propriété qui serait atteinte dans le mode de partage entre les enfans ; ce seraient des habitudes dignes d’encouragement, telles que les assurances sur la vie avec leurs combinaisons