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Le berceau de Rome serait son sépulcre, si Rome pouvait mourir.

Les Barbares qui attaquaient Rome au début du Ve siècle avaient eu des prédécesseurs. Les Teutons et les Cimbres, au moins en partie d’origine tudesque, furent un premier flot de l’invasion germanique. César semble avoir pressenti le danger qui menaçait Rome encore de si loin ; il repoussa au-delà du Rhin les Germains d’Arioviste, et son plan était, sitôt qu’il serait roi, d’aller chercher à travers l’Asie les plus lointaines extrémités de l’Europe septentrionale, et d’en soumettre, comme il avait fait pour la Gaule, les nombreuses nations, qui, bientôt atteintes aussi par la civilisation romaine, auraient de même cessé d’être un danger pour elle. Si César eût exécuté ce dessein, il eût peut-être supprimé les Barbares ; mais il n’eut pas le temps de l’accomplir. Il ne lui fut pas donné de racheter par ce grand service rendu à la civilisation son crime envers la liberté. L’empire, qui n’eut des césars que le nom, n’osa point tenter cette immense entreprise ; mais, dès son origine, il commença contre les Barbares une lutte dans laquelle il devait être défait pour le châtiment mérité des Romains.

Germanicus répara le désastre qu’avaient subi les armées romaines sous Auguste, Tibère fit vingt ans la guerre en Germanie, Caligula eut la prétention de vaincre les Germains sans les avoir rencontrés, Claude fit contre eux une expédition peu importante ; dans les troubles qui suivirent, on les oublia. Les Flaviens tournèrent surtout leurs armes vers l’Orient ; mais le premier grand et bon empereur que Rome ait connu, Trajan, employa presque toute la durée de son règne à subjuguer les populations du Danube : sa colonne raconte ses victoires. Marc-Aurèle marcha sur ses traces. Septime Sévère mérita les noms de Germanique et de Dacique qu’on lit sur son arc de triomphe. Tous les empereurs qui ont quelque intelligence et quelque vigueur combattent sur le Rhin ou sur le Danube. Le second Claude s’appelle le Gothique. Aurélien, qui triompha de Zénobie, triompha aussi des Francs ; mais la valeur de ces princes, remarquables par leurs talens militaires et l’emploi constant qu’ils en firent contre les Barbares, n’empêchait pas ceux-ci d’avancer sur Rome. Gallien leur ouvrit l’empire ; le mur élevé par Aurélien et réparé par Honorius ne put les arrêter. Constantin avait déserté le poste qu’il aurait dû défendre. En vain ses successeurs d’Occident, comme pour réparer sa faute, reportèrent le siège de la puissance aux avant-postes de l’empire. Il était trop tard, et un jour le Goth Alaric parut à la porte Salara, tout près de la porte Colline, qu’avait menacée Annibal et par laquelle étaient entrés les Gaulois. Cette fois Rome devait succomber ; elle n’avait plus le sénat qui