Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 12.djvu/485

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


DES HOMMES
ET
DES HISTOIRES DE LA RESTAURATION

I. — Discours de réception de M. le duc de Broglie à l’Académie Française.
II. — Notice sur M. le comte de Sainte-Aulaire, par M. le baron de Barante.


I.


Ce semble une loi des choses humaines que toute société soit presque constamment soumise à deux principes qui s’en disputent la domination. La lutte tantôt calme, tantôt vive, un antagonisme tantôt masqué par des transactions, tantôt manifesté par des ruptures, est comme le fond de l’histoire intérieure des nations. Aux momens les plus tranquilles de leur existence, il serait toujours possible, d’apercevoir dans leur sein deux esprits cachés qui se livrent une sourde guerre, ou qui ne font que des trêves par lassitude ou par raison. D’ordinaire l’un d’eux représente le passé, l’autre exprime des besoins nouveaux et cherche le changement. En toutes choses, la sagesse pratique conseille d’amener les deux adversaires à un compromis tolérable, et toutes les fois qu’on parle soit d’une époque de stabilité et de bonheur, soit d’un heureux ou habile gouvernement, il est probable qu’on fait allusion à quelque période de temps signalée par un de ces accommodemens qui établissent entre deux forces contraires un équilibre un peu durable. C’est qu’apparemment la société ou le pouvoir, la politique ou l’opinion, ont su réaliser un sage mélange des élémens qui fermentent au fond des esprits et des