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de son agriculture et la découverte de nouveaux gisemens de phosphate de chaux ne l’avaient sauvée. Ce résultat funeste, là où les lois de la chimie ne sont pas observées, où le bilan entre l’exportation et l’importation n’est pas exactement fait, est plus ou moins tardif, mais il est infaillible. Ce qui ruine les états ruine aussi les particuliers. Chacun doit s’attacher à vendre surtout des matières organiques qui ont été enlevées à l’air. C’est en ce sens que la culture du blé doit être restreinte, car la vente de chaque hectolitre diminue l’avoir du cultivateur de près de 2 kilogrammes de phosphates de chaux, de potasse et de magnésie qu’il faut racheter. Les betteraves au contraire, le sorgho, l’orge, les pommes de terre, etc., peuvent facilement n’être pas vendus en nature, ou du moins peuvent être restitués en partie au sol. Il suffit d’extraire la fécule, le sucre, l’amidon ou l’alcool, en gardant les résidus, qui, pour l’agriculteur, sont les matières véritablement précieuses. Aussi une féculerie, une raffinerie ou toute autre industrie jointe à une ferme ou voisine de l’exploitation sont-elles d’une utilité incontestable. Non-seulement le bénéfice provient de ce qu’aux revenus du fermier s’ajoutent ceux de l’industriel, mais surtout le fermier ne vend alors que l’air du ciel, et il n’a dépensé que la main-d’œuvre ; il n’a perdu ni phosphates, ni silicates, ni soude, ni chaux, ni potasse, c’est-à-dire ni sa chair ni son sang. Ici encore, on le voit, la théorie chimique vient confirmer les résultats des praticiens éclairés, et la ferme de Bresles, qui rapporte 17 pour 100 à ses propriétaires, est là pour prouver si la raison n’est pas du même côté que le succès. Quoique ces notions soient vulgaires aujourd’hui, nous ne devons pas dédaigner de les répéter, car l’accord entre la théorie et la pratique prouve, non pas l’utilité intellectuelle des notions scientifiques, qu’on n’ose plus mettre en doute, mais l’utilité pratique de ces notions, beaucoup plus contestée.


IV

Les animaux, comme les plantes, sont soumis aux lois de la chimie ; vivre ou engraisser, c’est être le siège de réactions chimiques bien déterminées, et les principes, vrais pour les uns, sont vrais pour les autres. Eux aussi, a très bien dit M. Isidore Pierre, sont comme des armoires, et on n’en peut retirer que ce qu’on y a mis. Ils font de la chair, du lait, des os, de la graisse, lorsque les substances dont on les a nourris contiennent les élémens de ces composés, et sauf les maladies, dues pour la plupart à d’autres réactions moins connues, ils ne maigrissent que lorsqu’ils ne mangent point assez, comme une plante est faible si le sol est stérile. Chez eux aussi, nous