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effrayante : on peut suivre la trace du courant boueux qui les a transportes depuis le milieu du cratère jusqu’à une distance de 12 kilomètres ; la plus grande largeur de ce champ de débris est de Il kilomètres. Tout cet espace est jonché de blocs trachytiques, plus ou moins scoriacés, de 2 à 3 pieds de diamètre ; les intervalles sont remplis par du sable.

En même temps que le Pepandajan, deux autres volcans de Java firent éruption : le Tjerimaï, situé à 19 lieues, le Slamat à 35 lieues. Un volcan beaucoup plus rapproché, le Guntur, alors comme aujourd’hui extrêmement actif, ne sortit pourtant pas de son repos.

Le cratère du Pepandajan présente encore tous les signes de volcanicité que l’on rencontre à Java : lacs boueux agités par des vapeurs, solfatares, petits volcans de boue, sources chaudes. En approchant du sommet, on entend le bruit confus de toutes ces émanations, que M. Junghuhn compare au vacarme ordonné d’une usine où un grand nombre de machines sont en mouvement : c’est ce qui a sans doute valu à la montagne le nom de Pepandajan, qui veut dire la forge. Les petits volcans de boue disséminés dans le cratère ont de 2 à 4 pieds de hauteur : ils ont un petit cratère circulaire, d’où sort de temps en temps, à des intervalles très réguliers, un jet d’eau trouble et chaude extrêmement violent. Ces petits cônes deviennent de plus en plus élevés par l’accumulation de la boue qui se dessèche à l’air jusqu’au jour où un ébranlement subit fait écrouler tout l’édifice.

La plus terrible éruption dont on ait gardé le souvenir dans les îles de la Sonde n’eut pas lieu à Java même, mais dans l’île de Sumbavva, qui en forme en quelque sorte le prolongement oriental, et se rattache à la même chaîne volcanique. Cette éruption est peut-être la plus effrayante qu’on puisse trouver dans l’histoire des volcans du monde entier : elle remonte à quarante ans seulement, et pourtant qui s’en souvient, hormis quelques géologues ? Qui sait le nom et la place du volcan Temboro ? Il semble que les catastrophes les plus épouvantables ne puissent nous toucher que quand elles sont près de nous, ou qu’elles se mêlent à des souvenirs qui nous sont devenus familiers. On va remuer la cendre qui a enseveli Pompéi et nous a fidèlement gardé à travers les siècles les trésors et les raffinemens du goût antique : on ne compte pas les forêts et les plantations des îles de la Sonde que la cendre a ensevelies. Personne n’ignore comment périt Pline l’Ancien en l’an 79. Qui sut jamais ou se rappelle qu’en 1815 l’éruption du Temboro coûta la vie à plus de 50,000 personnes ?

Il est heureux qu’à cette époque sir Stamford Railles ait été gouverneur