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DE
L’INFLUENCE SPIRITUALISTE
DE M. COUSIN

Fragmens et Souvenirs, par M. Victor Cousin.



Presque toutes les générations, en entrant dans la vie, ont commencé par une opinion exagérée de leur force et des destinées qu’elles se croyaient appelées à remplir. Les grandes générations sont celles qui, après bien des luttes, des mécomptes, des demi-victoires et des demi-défaites, arrivent sur leurs vieux jours à réaliser une partie de leurs rêves de jeunesse. C’est au contraire un des traits caractéristiques de celle qui depuis quelques années a pris possession d’elle-même que de débuter par la défiance et l’abandon. La génération qui nous a précédés, celle qui entra dans la carrière en 1815 et atteignit en 1830 la plénitude de sa virilité, apportait avec elle des espérances presque illimitées. En tout, elle se proclamait appelée à renouveler, et, comme si l’humanité fût née une seconde fois avec elle, elle se croyait capable d’inaugurer en son siècle une littérature nouvelle, une philosophie nouvelle, une histoire nouvelle, un art nouveau. Elle n’a pas donné tout ce qu’elle promettait : elle promettait l’infini ; elle n’a pas renouvelé l’esprit humain : cette œuvre est plus difficile qu’on ne le croit d’abord. Mais, en ne tenant qu’une très petite partie de son programme, elle a donné beaucoup ; la génération qui a suivi, en tenant toutes ses promesses,