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gouvernement peut choisir entre différens moyens : la voie des emprunts, les revenus et la vente des domaines de l’état, enfin l’augmentation des impôts.

On comprend que lorsqu’il s’agit d’apporter des remèdes solides et durables aux embarras financiers d’un gouvernement qui n’a que trop emprunté, il ne peut pas être question de contracter de nouveaux emprunts. La vente des domaines nationaux a été entreprise depuis quelques années en Autriche et dans de très grandes proportions. Au reste, cette ressource n’opère que lentement, et dans la situation des affaires en Europe on ne saurait en attendre de grands résultats. Enfin la plus grande partie des biens qui se trouvaient encore dans la possession du gouvernement vient d’être cédée à la banque de Vienne en paiement partiel des dettes de l’état. Les revenus des domaines non aliénés ne figurent dans le budget des recettes que pour une somme tout à fait insignifiante. Il ne reste, on le voit, qu’un seul moyen d’augmenter les revenus de l’empire autrichien : — l’accroissement des impôts publics.

Un observateur superficiel peut trouver facile d’augmenter les impôts dans un pays aussi vaste que l’Autriche, qui, tout en ayant une étendue et une population égales, même de quelque peu supérieures, à celles de la France, ne perçoit qu’un peu plus du tiers des revenus du budget français. Quiconque cependant voudra bien rechercher où en sont, au point de vue de la civilisation et du bien-être matériel, les deux tiers des peuples autrichiens[1], se persuadera aisément qu’il n’y a pas de comparaison à faire entre la France et l’Autriche sous le rapport de leur aptitude à supporter le poids des charges publiques. On n’a qu’à se rappeler ce que nous venons de dire relativement au produit des impôts sur les consommations en Autriche pour voir de combien la consommation moyenne y est inférieure à la consommation française, tant pour les objets de luxe que pour ceux de première nécessité. Malgré son grand avenir et ses ressources futures, l’Autriche d’à présent est pauvre en capitaux ; sa population moyenne est peu nombreuse, et encore sur divers points imparfaitement civilisée ; ses moyens de communication, son industrie et son commerce sont peu développés. Surcharger d’impôts un tel pays, ce serait en vérité tuer la poule aux œufs d’or. Il ne faut pas oublier du reste que les impositions publiques ont déjà été augmentées de 70 pour 100 dans ces huit dernières années, proportion colossale et sans exemple dans l’histoire. Aussi le nombre des contribuables qui se trouvent dans l’impossibilité de suffire aux charges

  1. C’est-à-dire les habitans des provinces hongroises, croates, dalmates, polonaises, etc., évalués à 26 millions à peu près.