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REVUE MUSICALE

LE PARDON DE PLOËRMEL.



Le succès du nouvel ouvrage de Meyerbeer, le Pardon de Ploërmel, n’a fait que s’accroître depuis la première représentation, qui a eu lieu le 4 avril sur le théâtre de l’Opéra-Comique. Le public, qui juge en dernier ressort les œuvres dramatiques, de quelque nature qu’elles soient, a ratifié par ses applaudissemens l’impression favorable que nous avons déjà communiquée aux lecteurs de la Revue sur cette tentative téméraire de l’auteur illustre de Robert et des Huguenots. Il nous le disait spirituellement cet hiver : « Je fais un acte digne d’un sous-lieutenant en donnant un ouvrage où je me suis privé volontairement de toutes les ruses de guerre qui ont fait ma réputation. Contrairement à ce qu’a fait le grand poète latin, je viens moduler sur des pipeaux rustiques, gracili arena, après avoir embouché la trompette héroïque et chanté les grandes passions du cœur humain; que la critique me soit légère!» Tel devait être aussi à peu près le langage de Sixte-Quint avant d’être élu souverain pontife. Non, non, cher et illustre maître, vous ne nous attendrirez pas; vous êtes un fort d’Israël, et c’est comme une puissance reconnue et consacrée par l’opinion de tous que nous vous traiterons : de la justice, et pas de complaisance.

Le sujet du Pardon de Ploërmel est l’un des plus simples qu’on pût choisir. Il s’agit d’une légende empruntée aux traditions poétiques de la Bretagne, cette terre des vieux souvenirs, où se sont succédé et superposées des civilisations si différentes. Les auteurs du libretto, MM. Jules Barbier et Michel Carré, se sont évidemment inspirés des travaux d’un écrivain laborieux et honnête, Emile Souvestre, dont les Récits de la Muse populaire, publiés par la Revue, contiennent une histoire pittoresque des mœurs et des croyances naïves de la Bretagne. La donnée de leur pièce est tirée d’un de ces récits.