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résulté des transactions qu’ont produites les relations souvent violentes qui ont existé entre les souverains et leurs peuples. Une transaction entre le pape et ses sujets serait d’autant plus facile, si la cour de Rome voulait s’y prêter, qu’elle pourrait s’opérer sous l’arbitrage de l’Europe. Si cet arbitrage était malheureusement décliné, il n’y aurait plus qu’une expérience à tenter : ce serait de laisser le saint-père et ses sujets s’arranger ensemble.

La situation provisoire dans laquelle l’Italie est laissée depuis plusieurs mois, et qui est si tendue à Rome, ne pourrait pas se prolonger sans périls. L’on annonce maintenant, et, nous l’espérons cette fois, l’attente du public ne sera plus trompée, que le traité de Zurich sera signé dans deux jours. La tâche de la conférence de Zurich n’était point à coup sûr la partie la plus difficile de la liquidation politique de la dernière guerre. Sans doute il y avait bien des questions litigieuses de délimitation de territoire et d’attribution de la dette autrichienne à régler à propos de la cession de la Lombardie. Le point auquel l’Autriche s’est attachée avec le plus de ténacité a été la portion de la dette qu’elle voulait imposer à la Lombardie. Au chiffre auquel elle élevait ses prétentions, M. Des Ambrois avait bien raison de dire qu’on ne traitait plus de la cession, mais de l’achat de la Lombardie. Quoi qu’il en soit, la conclusion des travaux de la conférence de Zurich est un fait heureux. Il fallait que ces travaux fussent achevés pour que les grandes puissances pussent donner l’attention qu’elle réclame à la situation de l’Italie centrale. Aussi ne sommes-nous pas surpris qu’avec les bruits qui annoncent la signature imminente du traité de paix coïncide la nouvelle de la prochaine réunion d’un congrès. Nous ne chercherons ni à deviner si les grandes puissances se sont en effet mises d’accord sur les bases d’une délibération collective, ni à pressentir les décisions auxquelles elles peuvent arriver ; nous attendons patiemment que la toile se lève, et nous ne doutons pas que le spectacle ne donne une ample satisfaction à notre curiosité.

À la veille d’une telle éventualité, il serait oiseux de s’étendre en conjectures sur l’avenir de l’Italie centrale. Un crime horrible, commis à Parme par une populace enivrée des plus féroces passions, a naguère attristé dans toute l’Europe les amis de la cause italienne ; mais il serait injuste d’y lire un mauvais horoscope de l’avenir de l’Italie centrale. Si, dans la ville de l’Italie supérieure où la multitude est animée du plus dangereux esprit, où malheureusement il n’y avait pas de force armée, où, en l’absence du dictateur, M. Farini, les autorités n’ont pas su ou n’ont pas pu suppléer par l’intrépidité et l’énergie morale aux moyens militaires qui leur manquaient, un odieux attentat a été accompli, il sera vengé avec une sévérité exemplaire. Déjà l’indignation et la fermeté témoignées par M. Farini à son retour à Parme et la vigueur avec laquelle il poursuit les coupables et désarme la portion dangereuse du peuple sont le commencement d’une réparation morale qu’achèvera la punition des assassins. Tout en frémissant à la pensée de la scène dont Parme a été le théâtre, on ne peut s’empêcher de rendre hommage à l’esprit de modération qui a régné jusqu’à ce jour dans les autres parties de l’Italie au sein de populations auxquelles leurs anciens gouvernemens avaient légué de si tristes exemples et de si justes ressentimens ; mais, nous le répétons, il y aurait une cruelle témérité à soumettre trop longtemps l’Italie à l’épreuve du provisoire.