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jusqu’à la saison des pluies, où les travailleurs, inoccupés au dehors, consacrent leur temps à débarrasser les graines des pellicules, ou enveloppes friables, encore adhérentes. L’opération s’exécute dans l’auge circulaire d’un moulin à meules verticales en bois. Un simple vannage suffit ensuite pour enlever les derniers débris pulvérulens[1].

De l’emploi de ces méthodes imparfaites dérivent les nuances infinies qu’on observe entre les cafés livrés au commerce. La science n’a-t-elle donc pas de procédés meilleurs à indiquer ? Il en est deux heureusement très préférables aux méthodes qu’on vient de décrire, et dont j’essaierai de donner une idée. De ces deux procédés, l’un est de date récente, l’autre, chose singulière, est de tous le plus ancien. L’un et l’autre, quoique appelant encore diverses améliorations, donnent déjà de très bons résultats. Parlons d’abord de la plus ancienne méthode. Dans les contrées de l’Arabie-Heureuse, on se contente de laisser mûrir les baies sur l’arbre jusqu’à ce qu’elles s’y dessèchent en partie ou tombent spontanément. On les livre ensuite au commerce après les avoir débarrassées la plupart de leur enveloppe par la trituration. Le café se trouve ainsi à l’abri des altérations spontanées et des déperditions qui résultent des fermentations ou des lavages. La méthode nouvelle se rapproche ; de la méthode primitive en ce sens qu’après avoir cueilli les baies du cafier au fur et à mesure de la complète maturation, on les fait dessécher le plus vite possible pour les soumettre aussitôt à la trituration et au décorticage[2]. On facilite ces diverses opérations par d’ingénieux appareils, qui permettent d’opérer la dessiccation, sans écraser la pulpe, par des ventilateurs perfectionnés, etc., et on rehausse ainsi la valeur des cafés de nos colonies des Antilles et de Bourbon.

  1. Cette poussière, produite par le vannage ou décorticage des grains de café, doit être constamment expulsée des ateliers par de larges courans d’air, car il s’y développe en abondance des insectes dangereux appelés chiques, qui s’attachent à la peau des hommes, pénètrent jusque dans les muscles, et s’y multiplient souvent au point de déterminer des plaies de mauvaise nature.
  2. Il est à remarquer que le décorticage complet n’est pas regardé comme une opération indispensable en tous pays. La Bolivie par exemple et Java expédient en France une sorte de café dont les baies ont été seulement débarrassées de leur pulpe, et non de l’enveloppe coriace qui touche les grains. Connus sous le nom de café en parche, ces grains paraissent plus volumineux que les autres ; mais si l’on brise avec les doigts l’enveloppe friable qui les entoure, on reconnaît qu’ils sont assez petits. Plus dispendieux de main-d’œuvre et de transport que les cafés ordinaires, le café en parche acquiert par la torréfaction un arôme très délicat. Les Boliviens apprécient beaucoup cette sorte de produit, qu’ils appellent café des Yuncas.