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une immense quantité de coquillages microscopiques ; mais ces coquillages paraissent avoir été détachés par le mouvement des eaux du sol qui fait le fond de l’Océan, et dans les couches duquel ils étaient déposés. Au reste, les limites des zones zoologiques ne sont pas plus nettement tracées dans les mers que sur les continens, et une espèce subsiste encore à une certaine profondeur, que déjà l’on voit apparaître l’espèce de la région limitrophe.

Ce qui achève de rapprocher les lois de la distribution de la vie dans les eaux et sur les terres, c’est que la profondeur des mers, de même que la hauteur des montagnes, reproduit en quelque sorte l’échelle des latitudes. Une montagne offre à ses différentes stations des fleurs analogues à celles qui se présentent successivement aux regards si l’on voyage de l’équateur aux pôles ; de même, plus on s’enfonce dans l’Océan, plus on trouve une faune semblable à celle des mers polaires. Ce qui démontre bien que, malgré l’espace libre ouvert par l’Océan aux espèces qu’il renferme, les conditions de température, de profondeur et la nature du fond créent pour celles-ci des frontières aussi infranchissables que nos montagnes, c’est qu’il est des familles entières d’animaux marins qui ne se sont jamais avancées hors des mers où elles sont cantonnées. Quoique les hydrophis ou serpens de mer, qu’il ne faut pas confondre avec le fabuleux animal de ce nom, infestent les mers des Indes, de la Chine et de la Polynésie, ils ne dépassent jamais la côte de Malabar.

On n’a point encore complètement établi la carte des lieux fréquentés par chaque espèce terrestre ; mais les lignes principales ont été tirées. On a reconnu l’existence de grandes frontières qui peuvent servir pour les divisions générales. Les aras, perroquets aux joues dégarnies de plumes, s’éloignent peu de l’équateur et dépassent à peine au sud le 17e degré. En Asie, le chameau commence à se montrer là où l’éléphant disparaît, et ce dernier animal ne se rencontre pas à l’état sauvage dans l’Indo-Chine, au nord du 21e degré 21 minutes de latitude. En Asie, le singe a pour limite extrême le 35e degré latitude nord. Un magot (inuus speciosus) se rencontre encore aux îles Sikokf et Kiu-siu dans l’archipel du Japon. Ces quadrumanes suivent en général dans leur distribution celle de la famille des palmiers, et s’ils remontent à une latitude aussi boréale dans le Japon, c’est que ces grands monocotylédones y viennent toucher aux conifères. Dans l’Amérique australe, les singes ont disparu dès le 29e degré latitude sud.

En thèse générale, la chaleur est favorable au développement de la vie animale. Comme dans les contrées tropicales ou subtropicales la flore est en général plus riche, les animaux herbivores bu frugivores trouvent une nourriture plus facile et plus variée ; l’accroissement