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seront jamais dépourvues de consolations tant qu’elles auront autour d’elles des coreligionnaires comme l’auteur des Horizons prochains.

Mais chut ! n’effleurons pas, même de la manière la plus discrète, les doctrines et les dogmes. « Venez avec moi, nous dit Mme de Gasparin, venez sans crainte, je ne suis pas un théologien. » Ses livres ne sont point des livres de doctrine, ce sont des livres de pur sentiment. Acceptons-les donc tels qu’elle nous les donne, pour des consolations spirituelles, et n’y cherchons pas autre chose que des consolations. Ne les lisez point, vous qui ne pouvez être distraits que par les joies mondaines et les plaisirs bruyans ; il n’y a rien là pour vous, vous n’en sentiriez pas le charme, vous ne sauriez pas découvrir ce qu’ils ont de beauté littéraire. Je vous vois d’ici, tournant les feuillets d’un œil distrait, et disant impoliment, avec un bâillement peut-être : « Que nous veut cette prêcheuse ? » accueillant avec un sourire d’incrédulité ceux qui vous affirmeront qu’il y a dans tels de ces chapitres, le Paradis qui fait peur, par exemple, ou Jésus ressuscité, plus de véritable imagination que dans le plat roman nouveau que tout le monde veut lire. Mais vous les lirez, vous qui, selon l’expression de l’auteur, aimez les joies modestes et les humbles bonheurs ; vous y trouverez un miroir bien net et bien uni dans lequel il vous plaira de voir se réfléchir votre image. Je vous le recommande aussi, à vous, âmes orageuses, qui êtes revenues des longs voyages, et qui cherchez un peu d’ombre et de paix ; il vous donnera, ne fût-ce qu’un instant, et entre deux tempêtes, le souci des choses éternelles. Vous en serez pacifiées pour quelques heures, et vous remercierez l’auteur non du plaisir littéraire qu’elle vous aura donné, elle n’y songe guère, mais du baume bienfaisant qu’elle aura versé sur vos plaies.

Pour moi, je dirai tout hardiment : j’ai éprouvé un sentiment de véritable satisfaction en lisant ces deux petits livres consolateurs, écrits par une plume protestante. Je suis charmé de voir qu’ils ont été inspirés par la doctrine religieuse qui est réputée par le vulgaire comme la plus renfrognée, la plus pédantesque, la plus austère, celle qui verse les consolations religieuses avec le plus de sécheresse et d’avarice. Je sais depuis longtemps que ce sont là des calomnies, et je suis tout heureux de rencontrer une preuve qui confirme mes sympathies. Noble église, qui au milieu de la décadence universelle comptez encore tant d’âmes loyales et vaillantes, courage ! D’une manière ou d’une autre, un grand avenir vous est réservé. Parlons par paraboles, et de manière à n’être pas compris des profanes, mais à être entendu seulement des deux parties intéressées. Bien souvent, en lisant les écrits du protestantisme moderne, il est revenu