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des poudres de qualité inférieure, et ils ont toujours été abandonnés dès que les circonstances l’ont permis. Il est bien prouvé aujourd’hui que la poudre doit offrir une certaine compacité pour rester énergique sans être brisante.

En Angleterre, où la fabrication est livrée en grande partie à l’industrie privée, plus familiarisée que partout ailleurs avec l’emploi des machines, plusieurs poudriers ont adopté l’usage de grandes meules verticales, même de presses très puissantes, pour augmenter la consistance trop faible obtenue par l’action des tonnes ou par un battage trop rapide. Peut-être est-ce faute d’une surveillance suffisante, mais ils n’ont pas toujours obtenu ainsi des résultats très réguliers. Leurs poudres ont été quelquefois inférieures à celles des pilons ; plus fréquemment elles ont manifesté des propriétés brisantes, et pourtant il n’est pas douteux qu’il n’y ait dans l’emploi combiné des tonnes et des presses le germe d’une réforme économique dans la fabrication. Dans tous les cas, et de quelque manière qu’il se fasse, le battage est une opération des plus dangereuses. Aussi les règlemens prescrivent en France qu’il ait lieu hors de la présence des ouvriers ; les meules ou les pilons ne sont mis en mouvement que lorsqu’ils se sont retirés, et ils s’arrêtent encore quand d’heure en heure les ouvriers reviennent surveiller la marche de l’opération, renouveler l’eau évaporée, détacher avec des couteaux de bois les portions de galette qui s’amassent sur les bords, et s’assurer que toutes les chances défavorables ont été écartées.

Après l’action du battage, la pâte se présente sous la forme d’une galette homogène, assez sèche pour ne pas adhérer aux doigts, et dont les fragmens doivent être soumis à l’opération délicate du grenage. Cette opération est d’une importance extrême, et on ne l’a jamais négligée depuis le XVIe siècle, c’est-à-dire depuis l’époque où l’usage de la poudre a pris une certaine extension. Auparavant on se contentait d’employer la galette écrasée à l’état de pulvérin, ou de poussière douce comme de la farine, suivant l’expression des vieux auteurs ; mais une observation attentive fit apercevoir qu’alors la combustion se faisait mal, et que trois parties de pulvérin produisaient à peine le même effet qu’une partie de poudre grenée. La raison en est simple : cette dernière, ayant une composition plus égale et une densité plus grande, doit brûler plus vite, et cet effet s’augmente par la flamme, qui s’insinue dans les interstices et communique la faculté explosive à un grand nombre de grains à la fois. Le pulvérin au contraire se consume par couches et inégalement ; aussi depuis longtemps en a-t-on abandonné l’emploi. Pour grener la poudre avec célérité et faire en même temps le triage des grains de diverses grosseurs, les fragmens de galette sont placés dans un