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fait l’organe dans sa brochure énergique sur la Hongrie et la Crise européenne, que le temps des compromis est passé, soit que, plus patient, on interprète les hésitations visibles de la cour de Vienne dans la réorganisation de l’empire comme les dernières incertitudes qui précèdent des concessions nouvelles dont la Hongrie pourra être satisfaite, il nous semble que nous pouvons de toute façon nous attendre à un prochain réveil politique de la Hongrie. L’empire d’Autriche est dans une de ces situations chancelantes qui exigent tant de remaniemens et de réparations que l’assemblée la plus élémentaire, recrutée et nommée par qui l’on voudra, fût-ce même comme le nouveau conseil de l’empire par le souverain, pourvu qu’une part lui soit faite dans la délibération des affaires publiques, doit inévitablement et promptement finir par prendre la situation prépondérante dans l’état, et mettre souverainement la main aux réformes attendues de tous. D’une assemblée des notables sortiront les états-généraux, bientôt transformés en assemblée constituante. Il est probable que l’on a en Allemagne le sentiment profond de cette situation précaire, délicate, périlleuse de l’Autriche, et que ce sentiment n’est pas non plus étranger à ce besoin d’accord et d’union entre les souverains allemands qui se manifeste par la réunion de Bade. Les gouvernemens libres ont cet avantage qu’il vient toujours un moment où les situations les plus obscures s’éclaircissent et où la vérité des choses apparaît par les manifestations des chambres, appelées à intervenir directement dans les affaires du pays. C’est ce qui arrive aujourd’hui en Espagne, où le parlement vient de s’ouvrir après une campagne faite pour flatter l’orgueil national, et au lendemain de cette triste échauffourée carliste qui a été vraiment une diversion plus maussade que dangereuse. Tant que les chambres n’étaient point ouvertes, on a pu se livrer à toute sorte de commentaires sur la guerre du Maroc et sur la conclusion aussi heureuse que rapide de cette campagne. Des déceptions éveillées par une fin si prompte étaient tout près de dégénérer en opposition. Au fond, il y avait quelque incertitude, suite inévitable des divergences qui s’étaient élevées dès le premier moment jusqu’au sein des pouvoirs publics sur l’opportunité et sur les conditions de la paix avec l’empereur du Maroc. Il en était de même de l’insurrection carliste. Le gouvernement sans nul doute avait eu promptement raison de cette folle tentative, et après quelques actes de répression sommaire, il s’était habilement empressé de couper court à toute réaction par la plus large amnistie ; enfin le comte de Montemolin lui-même signait entre les mains de la reine Isabelle sa déchéance de prétendant. Mais quelle était la portée réelle de ces faits ? L’amnistie combinée avec la soumission du comte de Montemolin équivalait-elle à une réconciliation volontaire des deux branches de la famille royale ? Il y a en Espagne des personnes qui caressent depuis longtemps cette idée de fusion dynastique, et qui n’ont pas manqué, à ce qu’il paraît, d’interpréter dans ce sens les derniers événemens ; fort peu libérales d’inclinations, elles ont vu dans la ridicule défaite du parti carliste un moyen de