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16,520,000 pour l’Angleterre, de 3,004,290 pour l’Écosse ; en 1858, de 19,523,000 pour l’Angleterre, de 3,093,000 pour l’Écosse. Sur l’Irlande, le document se tait ; on sait quels vides y ont causés plusieurs années de famine. Le nombre des pauvres, malgré une population accrue, a diminué sensiblement : il était, en Angleterre, dans les maisons de travail ou au dehors, de 934, 419 en 1844, en 1858 de 857,003 ; en Écosse, de 82,357 en 1844, en 1858 de 79,199. Pour l’Irlande, les états où je puise constatent bien les violentes vicissitudes de ses destinées. En 1851, on y comptait 620,747 pauvres ; ce nombre était réduit à 44,866 en 1858. Il convient d’ajouter que le mot de pauvre n’a pas en Angleterre la même signification qu’ailleurs ; nulle part on ne supporte la pauvreté volontaire avec une tolérance plus voisine de l’encouragement. L’émigration n’affecte plus ces proportions alarmantes qui la portaient à 368,000 âmes en 1852 ; elle n’est, en 1858, que de 113,972 âmes. Le nombres des délits et des crimes s’est également réduit : il était, pour l’Angleterre et le pays de Galles, de 18,919 en 1844 ; il n’est, en 1858, que de 13,246. L’Écosse reste à peu près stationnaire ; l’Irlande, au contraire, obéit aux variations qui résultent de ses cruelles épreuves : de 20,767 condamnations, politiques pour la plupart, qui la frappent en 1850, elle descend à 2,940 en 1858. Les caisses d’épargnes ont aussi leur progression, lente, mais suivie : de 29,504,861 livres en 1844, elles passent à 36,109,409 en 1858. Enfin les décès et les naissances se mettent en équilibre avec l’accroissement de la population dans une moyenne qui est de 1 sur 45 habitans pour les premiers et de 1 sur 35 pour les secondes, moyenne supérieure dans les deux cas aux moyennes ordinaires.

Ainsi cette révolution économique a produit, avec une évidence frappante, des fruits supérieurs à ceux qu’on en attendait. Elle a, par des usurpations heureuses, agrandi son domaine et ranimé le sentiment moral là même où l’on n’avait en vue que la satisfaction matérielle. Non-seulement elle a créé de nouvelles richesses, mais elle les a distribuées plus équitablement. Elle se fondait sur ce qui apaise et touche le plus les hommes, un retour à la justice ; elle leur accordait ce qu’ils poursuivent par instinct, même au prix des orages, l’égalité de traitement. Elle a introduit dans le régime des intérêts un principe qu’on ne pourra plus méconnaître sans dommage ni sans péril, et qui peut se résumer en quelques mots : abandonner l’activité privée et publique à son cours naturel pour en tirer tout l’effet utile. Il semble que ce soit là une besogne aisée : aucune n’est plus rude ni plus remplie d’embarras. Tant de gens prétendent vivra aux dépens d’autrui qu’un gouvernement, si bien inspiré qu’il soit, ne peut toujours se défendre de certaines obsessions. Il lui faut un