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que la libre disposition des trois quarts du produit de leurs forêts, constitue avec le surplus une épargne pour l’avenir, mais ne va pas jusqu’à sacrifier leurs légitimes exigences aux besoins généraux du pays.


II

On a pu se convaincre par ce qui précède que des différentes circonstances qui influent sur le mode de culture à appliquer aux forêts, et par conséquent sur la nature et la quantité des produits qu’elles peuvent fournir, il n’en est pas de plus importante que la qualité du propriétaire. Faible et irrégulière chez les particuliers, la production ligneuse trouve dans le caractère permanent de la commune des conditions qui lui permettent de se développer davantage ; mais ce n’est que dans les forêts de l’état qu’elle peut être portée au plus haut point. Comment, dans ces différens cas, doit se régler cette production ? C’est ce qu’il nous reste à examiner.

Si les particuliers ont quelquefois intérêt à exploiter leurs forêts sans ordre ni méthode, et sont conduits, suivant les exigences du moment, tantôt à restreindre, tantôt à augmenter l’étendue de leurs coupes, il n’en est pas de même de l’état et des communes, qui doivent avant tout s’astreindre à en retirer annuellement la même quantité de matière ligneuse. Puisque la société a toujours besoin de bois, il faut que le marché en soit constamment pourvu, et il ne peut l’être qu’avec une production constante et uniforme. Régler les exploitations de manière à garantir cette continuité, c’est ce qui s’appelle fixer la possibilité d’une forêt. Cette opération n’est pas moins importante pour le propriétaire, à qui elle assure un revenu régulier, que pour la société, qu’elle met à l’abri de la privation éventuelle des bois dont elle a besoin.

Dans les taillis, la fixation de la possibilité est fort simple. La régénération de la forêt s’effectuant par les souches, on peut, sans craindre d’en compromettre la perpétuation, asseoir les coupes de proche en proche, et y abattre, sauf les réserves, tous les arbres qui forment la superficie. Si donc on a une forêt de 100 hectares à exploiter à la révolution de vingt-cinq ans, il suffira d’en couper chaque année la vingt-cinquième partie, ou Il hectares, pour que le roulement s’établisse d’une manière continue. Les parties qui arriveront successivement en tour d’exploitation présenteront toujours des bois âgés de vingt-cinq ans, qui donneront des produits en matière, et par suite en argent, sensiblement égaux, si le sol a partout à peu près la même fertilité. Cela s’appelle mettre une forêt en coupes réglées, mot qui a passé dans la langue usuelle pour désigner