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qu’elles soient, sont fécondes ; ainsi les métis humains se reproduisent toujours entre eux, à moins que le milieu local ne vienne mettre obstacle à cette reproduction. Et maintenant, demandera-t-on s’il se forme des races métisses entre les groupes humains ? Déjà nous avons répondu à cette question par un fait général qui se passe entre trois de ces groupes empruntés à trois parties du monde et à deux continens. Nous pourrions nous en tenir là ; toutefois, en présence de certaines affirmations, de l’assurance avec laquelle elles se produisent, nous croyons devoir revenir sur cette question. Au besoin d’ailleurs l’importance du métissage entre les diverses races humaines motiverait notre insistance.

À vrai dire, personne n’ose nier l’existence de populations résultant du croisement d’hommes qui présentent les caractères les plus distincts, les plus variés. Le fait domine de trop haut toutes les théories ; mais on cherche assez souvent à en diminuer la signification en mettant en avant quelques-unes de ces possibilités auxquelles il est si difficile de répondre, parce qu’au fond on ne trouve à peu près rien d’impossible. Seul, Knox va logiquement jusqu’au bout, et déclare ne pas croire aux races humaines mixtes. Il reconnaît bien qu’il existe des métis en Amérique ; mais, selon lui, ces métis sont dus presque uniquement à des croisemens immédiats. Ils disparaîtront du jour où le blanc, le noir et le rouge cesseront de s’unir entre eux. Apporte-t-il quelque preuve à l’appui de cette opinion ? Aucune. Voyons donc si les faits sont pour lui.

Dans la dernière édition de ses Elémens d’ethnologie, M. d’Omalius d’Halloy évalue à 1 milliard la population du globe, et à 12,340,000 le chiffre des métis[1]. C’est en nombre rond 1/89e environ de la population. L’auteur ne comprend dans ce nombre que les produits croisés de races très différentes, tels que les mulâtres, les sambos, etc., c’est-à-dire ceux qui n’ont pu guère prendre naissance que depuis l’époque des grandes découvertes et sur les points où les races blanche, noire, rouge ou jaune se sont rencontrées. Or l’Europe échappe à peu près entièrement à cette condition. Les unions dont nous parlons y sont nécessairement très rares. C’est le blanc qui va porter partout son sang régénérateur. En Asie et en Afrique, il ne rencontre les races colorées que sur le littoral et dans quelques régions exceptionnelles. Ce n’est guère qu’en Amérique, et surtout dans les états espagnols et portugais de l’Amérique méridionale, que le mélange, devenu plus intime, a multiplié les croisemens, Or des documens cités par Prichard, il résulte que la population totale

  1. Ce chiffre est nécessairement au-dessous de la vérité, car on manque entièrement de détails statistiques sur une foule de points où le mélange des races s’accomplit journellement.