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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 octobre 1861.

Le roi de Prusse est parti, le roi des Pays-Bas arrive. Ce n’est point en nouvellistes de cour que nous mentionnons ces royales visites. Nous ne sommes pas enclins à exagérer la valeur de ces actes de courtoisie ; nous ne cherchons pas non plus à en restreindre l’importance. Il serait difficile par exemple de refuser toute signification politique au voyage du roi de Prusse à Compiègne. Après la guerre d’Italie amenant pour dénoûment l’annexion de la Savoie, une crainte vague, dirait-on si l’on se laissait aller à la pente du lieu-commun, aiguë, faudrait-il dire pour être vrai, s’était répandue en Europe. On voyait la France reprise de la manie des frontières naturelles. Après les Alpes, s’imaginait-on, viendrait le Rhin. Ce fut au plus fort de cette effervescence des défiances européennes que l’empereur alla visiter à Bade le roi de Prusse, entouré des souverains secondaires de l’Allemagne. Cette démarche caractéristique ne pouvait avoir qu’un sens : elle était un démenti donné aux appréhensions qui voyaient déjà la France déborder vers, le Rhin. Aujourd’hui ce démenti est redoublé par la visite du roi de Prusse à Compiègne. Il semble donc qu’un grand prétexte doive être par là enlevé définitivement au scepticisme qui règne en Europe touchant le maintien de la paix. Nous Saurions pour notre part qu’à nous féliciter d’un tel résultat.

Constatons que la portée politique que nous attribuons à la visite du roi de Prusse est justement celle que lui donne la portion de la presse allemande qui n’est point atteinte de gallophobie. Les feuilles libérales de Prusse s’accordent à prendre acte de ce grand fait : la politique impériale n’aspire pas à la frontière du Rhin. Ce point réglé, les journaux prussiens remarquent avec beaucoup de sens qu’il serait difficile de voir où pourraient s’élever entre la Prusse et la France des causes d’antagonisme. L’affaire