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le recruter exclusivement dans l’épiscopat. La défiance jalouse que nourrissaient envers la cour romaine la plupart des états catholiques, les obstacles que ces gouvernemens opposaient aux relations de leurs sujets avec Rome, n’auraient plus d’objet. La défiance cesserait, les obstacles tomberaient. Tout serait ainsi réglé au profit de l’église, de l’Italie et des autres peuples catholiques.

C’est une utopie, dira-t-on encore. Qui nous garantira vos garanties ? Qui nous assure que l’Italie ne les violera jamais ? Qui peut donner la certitude que jamais souverain ou gouvernement italien ne mettra la main sur la situation du saint-siège, qu’aucun politique ultramontain ne se laissera séduire par l’idée de dominer l’Europe au moyen de la papauté, qu’aucun roi d’Italie ne voudra faire du pape son chapelain ?

Il n’y a certes pas de convention ni de constitution humaine où l’on se puisse promettre d’avoir prévu toutes les difficultés et paré à tous les périls que l’avenir pourra faire naître. Aucun arrangement, sans contredit, ne saurait dispenser ceux qui l’ont conclu, ceux qui devront en exécuter les clauses, de la bonne foi, du bon sens, de la modération, de la clairvoyance, et ne peut leur assurer qu’ils seront à jamais affranchis des labeurs et des soucis de la lutte. Pas plus que les constitutions des sociétés politiques, les institutions qui concernent l’église ne sont des tentes dressées pour le sommeil. Ceux surtout qui voient aujourd’hui l’inanité des précautions qu’on était allé chercher pour la papauté dans le gouvernement temporel n’ont guère le droit de se montrer exigeans ou défians à l’égard du nouveau système de garanties qui leur est offert. Il faut ajouter pourtant que toutes les chances qui naissent de la nature des choses et toutes les vraisemblances plausibles s’élèvent contre l’incrédulité qu’ils témoignent touchant l’efficacité de la solution italienne. D’abord il ne sera pas de l’intérêt des Italiens de chercher un instrument d’influence politique dans la papauté ; ensuite l’indépendance et l’inviolabilité du saint-père pourront et devront être placées sous la garantie du droit européen ; enfin les Italiens, par les institutions politiques qu’ils se sont données, ont pris vis-à-vis d’eux-mêmes les garanties les plus sérieuses contre toute tentation qui pourrait leur venir d’attenter à l’indépendance de l’église.

Il n’est pas de l’intérêt des Italiens de chercher à faire du pape un instrument de leur politique. Le jour où ils l’essaieraient, ils ruineraient de leurs propres mains le crédit de la papauté ; ils briseraient, rien qu’en y portant la main, l’arme politique dont ils auraient la folie de vouloir se servir. Fussent-ils cependant assez peu raisonnables pour caresser un pareil dessein, leur serait-il possible