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Enfin, en continuant vers le sud, nous arrivons au banat de Temesvar. C’est de toute la Hongrie la région qui, au point de vue de la production des céréales, occupe le premier rang aussi bien par sa fertilité que par la qualité de ses produits. Le Banat peut, en cas d’urgence, envoyer ses grains à Trieste par chemin de fer, en les faisant passer par Pesth ; mais le parcours moyen serait de 900 kilomètres, et le coût par hectolitre de 4 fr. 90 cent. C’est évidemment par les voies d’eau que se fera l’expédition des blés du Banat, et du reste il en a été ainsi presque exclusivement jusqu’à ce jour. La majeure partie de ces blés est toujours venue se concentrer sur les deux principaux marchés de Torrok-Becsez et de Gross-Beskereck, situés l’un sur la Theiss et l’autre sur la Béga, et a été embarquée là en destination de Pesth ou de Raab. De ces deux marchés, la distance moyenne par voie d’eau jusqu’à Sissek est de 975 kilomètres, le coût total du transport jusqu’à Trieste serait de 3 fr. à 3 fr. 25 cent. Par la Drave, nous l’avons déjà dit, le trajet sera plus court, et le prix sera moindre. Il est encore une autre route que les blés du Banat prennent déjà en ce moment et prendront encore souvent pour aller à Trieste. Les bateaux partis de Torrök-Becsez ou de Gross-Beskereck remontent le Danube et viennent déposer leurs charge-mens soit à la gare d’Ofen-Pesth, soit à Tétény, station de la ligne Pesth-Trieste, située en aval de Pesth, au bord du Danube. Les frais de transport par cette route sont de 4 fr. 40 cent, par hectolitre.

Il résulte des données qu’on vient de réunir que le transport des fromens de Hongrie jusqu’à Trieste coûtera en moyenne de 2 francs 50 centimes à 2 francs 60 centimes par hectolitre au départ des marchés locaux de la rive droite, et, au départ des marchés de la rive gauche, de 4 à 5 francs si l’envoi est fait entièrement par les chemins de fer, de 3 francs 25 centimes à 3 francs 50 centimes s’il est fait par les voies mixtes. Il faudrait donc, pour que l’hectolitre pût arriver au prix de 16 francs ou 16 francs 50 centimes sur le marché de Trieste, que ce même prix ne dépassât point 13 francs 50 centimes ou 13 francs 75 centimes sur les marchés de la rive droite, et 12 francs 50 centimes ou 12 francs 75 centimes sur ceux de la rive gauche. Ces prix, qui correspondent à ceux de 3 florins 40 kreutzers et 3 florins, monnaie autrichienne d’argent, par metzen d’Autriche[1], sont-ils pour le cultivateur toujours suffisamment rémunérateurs ? Nous croyons pouvoir répondre nettement par l’affirmative.

La valeur de la terre varie d’un point à un autre en Hongrie dans des proportions beaucoup plus fortes que partout ailleurs, en raison de la position du terrain par rapport aux voies de communication, et le prix de production est naturellement soumis aux mêmes écarts. La question de transport joue un rôle d’autant plus grand que la plus forte partie des produits est exportée dans une seule direction. Aussi voit-on les prix s’élever sur les marchés locaux à mesure qu’on se rapproche des grands marchés

  1. Un hectolitre vaut 1 metzen, 6259.