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race plus intelligente et plus riche, est de beaucoup supérieur à ces huttes coniques primitives qui sont en usage dans la plupart des régions de l’Afrique. À la côte est, les villages ont des maisons assez vastes, longues et carrées, avec un toit de chaume en pente et de larges rebords débordant en guise de vérandas. Elles sont faites de claies et de menus morceaux de bois mêlés de terre. Dans toutes les contrées qui avoisinent le littoral domine le nyumba, hutte circulaire dont il existe beaucoup de variétés ; la plus simple est un cône fait de lattes et de branches liées à l’extrémité et recouvertes de chaume. C’est dans l’Afrique intérieure, près du lac Tanganyika, que la classique maison africaine de boue fait place au plus comfortable tembé. Les Arabes n’emploient guère d’autres constructions, et ils en ont transporté l’usage de l’autre côté du lac, là où reparaissent les huttes circulaires. Ces tembés sont de forme oblongue ou carrée, souvent irrégulière, et munis à chaque angle d’une espèce de petit fort qui les protège contre les attaques. Beaucoup de ces habitations sont ornées de représentations d’hommes et de serpens grossièrement figurés en terre : on voit aussi des croix sur les façades ; mais les indigènes n’y attachent pas une signification religieuse.

Dans la plupart des villages on ne pénètre que par une ruelle, en palissades, étroite et sombre. La toiture est faite de pièces de bois sur lesquelles on répand un épais gazon ; on lui donne une pente pour l’écoulement des eaux, mais peu inclinée, de façon à pouvoir y déposer des réserves de grains, le bois à brûler, le manioc, les pastèques, tout ce qui a besoin de soleil. Durant la saison des pluies, les toits verdissent, et à distance les tembés présentent l’aspect d’ondulations de terrain ; sur chaque face de la maison s’ouvrent une ou deux portes, assez larges pour laisser passer une vache. Après le coucher du soleil, ou les ferme soigneusement, et les habitans se gardent bien de sortir jusqu’au matin.

Chaque maison a ordinairement deux chambres que l’on appelle but et bin. La longueur varie de vingt à cinquante pieds, la largeur de douze à quinze. Ces chambres sont séparées par une cloison en bois ou par des nattes en paille, laissant une petite ouverture pour la lumière. Le but sert de parloir, de cuisine et de dortoir ; le bin reçoit quelque clarté de la porte ou d’une crevasse, car la fenêtre n’est pas encore inventée en Afrique. C’est le magasin de la famille. On y admet la nuit les chevreaux et les agneaux. C’est aussi l’asile des poules qui couvent. Le plancher de terre battue est rude, raboteux, inégal. Les bestiaux sont entassés pêle-mêle dans les cours ; leur nombre, les soins incomplets qui leur sont donnés, rendent l’atmosphère malsaine et développent les maladies de peau et la