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amazoniennes, sera mieux connue et mieux observée, nul doute que la population ne double1 toutes les vingt années sans le secours de l’immigration étrangère. C’est dans cette augmentation rapide d’une population mêlée, unissant à la fois l’initiative du blanc, à l’invincible force de résistance de l’Indien, que l’avenir du pays se trouve engagé.


III

Dans le remarquable rapport sur les régions amazoniennes, qu’il avait explorées pendant les années 1851,1852 et 1853 par l’ordre du gouvernement des États-Unis, le lieutenant Herndon reconnaît la docilité et la douceur des Indiens ; mais en sa qualité d’esclavagiste il cite avec complaisance « l’opinion d’hommes intelligens qui voient dans la pendaison le moyen le plus simple d’en finir avec l’Indien, et disent que, l’existence de ces hommes, incapables de devenir citoyens ou esclaves, ne vaut pas même la place qu’ils occupent. » — « Pour ma part, ajoute M. Herndon, j’estime que tous les rapports entre les blancs et les noirs doivent aboutir à la destruction complète de ceux-ci. Les noirs ne peuvent supporter ni les injonctions de la loi, ni le poids d’un travail imposé, et se retirent ? devant l’homme blanc et son œuvre de progrès jusqu’à ce qu’ils disparaissent complètement. Telle semble être leur destinée ; la civilisation doit avancer, quand même elle devrait marcher sur le cou du sauvage et le broyer sous son pas souverain. » Puis il offre un plan de gouvernement pour les indigènes. « Il faudrait, dit-il, supprimer les villages et réunir les Indiens dans de grandes colonies, nommer un gouverneur-général d’une grande influence, muni de pouvoirs dictatoriaux et recevant des appointemens élevés. Il faudrait en outre obliger les habitans à fournir au gouverneur une force permanente, et ouvrir le pays à la colonisation en accordant des privilèges et des concessions de terre. De cette manière, si l’Indien n’est pas amélioré, il sera du moins exterminé, et l’admirable région de l’Amazone pourra contribuer pour une large part à la prospérité du genre humain. » Il est heureux qu’il ne soit plus temps d’appliquer ce moyen civilisateur, et lorsque M. Herndon émettait cet avis, il lui eût suffi d’examiner attentivement la population des villes amazoniennes pour se convaincre que les Indiens, loin de se laisser déplacer ou anéantir, tendaient à ne plus former qu’un seul et même peuple avec les blancs, leurs anciens oppresseurs.

Pendant la domination portugaise, on avait adopté, pour le gouvernement