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dix bêtes en moyenne[1] pour une tête de gros bétail, notre population ovine ne représenterait donc pas les trois dixièmes de notre population bovine. Aujourd’hui en effet la grande division des propriétés tend à restreindre un peu l’importance agricole des moutons, et en ce qui concerne la commerce extérieur nous les voyons également figurer dans nos échanges avec l’étranger pour une masse moins importante que bs animaux d’espèce bovine. Nous disons pour une masse car lorsqu’il s’agit en même temps de ces deux sortes d’animaux, il faut tenir compte de leur poids relatif bien plutôt que de leur nombre. De 1827 à 1856 inclusivement, nous n’avons importé que 4,737,720 bêtes ovines[2], et nous en avons exporté 2,388,730[3] seulement.

C’est dès l’âge de dix-huit mois que la brebis est apte à devenir mère. La gestation dure cinq mois, et dans certaines races, dans les races communes surtout, les agnelages doubles se rencontrent assez fréquemment. Les bêtes des environs de Cognac et les excellentes bêtes suisses à laine noire, dont l’introduction a si bien réussi dans les Vosges, offrent de nombreux exemples d’une telle fécondité; mais les brebis lauraguaises et les brebis provençales d’Istre vont plus loin encore. Il n’est pas très rare qu’elles aient deux portées par an, et que de chacune de ces portées il résulte deux agneaux. Dans les races perfectionnées, les femelles sont moins fécondes; on ne doit guère compter que sur un seul petit par an. C’est peu de semaines après l’agnelage que le troupeau présente l’aspect le plus aimable. D’ordinaire le soleil commence à raviver la campagne, car on a eu soin de faire coïncider les naissances avec le prochain retour de la végétation. Ainsi agissent la plupart des éleveurs, pour assurer aux jeunes animaux et à leurs mères le bienfait d’une nourriture fraîche. Il faut alors voir revenir les brebis qu’une courte promenade avait tenues quelque temps éloignées. Toutes les bêtes s’agitent, toutes bêlent; toutes s’appellent et s’entre-cherchent, les blancs agneaux courant de l’une à l’autre au milieu des brebis dont la toison est noircie par les ordures et la poussière. Cette inévitable confusion ne dure que peu d’instans; chaque agneau ne tarde pas à

  1. Le calcul par têtes du nombre d’animaux que peut entretenir une exploitation et du nombre de moutons qui correspond à l’entretien d’une bête bovine laisse toujours le lecteur dans l’incertitude. Quel est en effet le type de cette bête? S’agit-il d’une petite bretonne ou d’une grosse normande? On devrait, à la rigueur, ne parler que du poids vivant des animaux. Nous le savons; mais nous avons voulu nous servir des données habituelles, de peur d’être moins généralement compris.
  2. 4,419,560 béliers, brebis et moulons, et 318,160 agneaux. Nos importations proviennent surtout, pour les bêtes adultes, des pays allemands, de la Belgique et de la Suisse, et de la Sardaigne pour les agneaux.
  3. 1,203,350 béliers, brebis et moutons, et 95,380 agneaux. L’Angleterre et l’Espagne sont les pays qui nous en ont demandé le plus grand nombre.