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la plupart des princes allemands catholiques une lutte inégale; après de courtes vicissitudes de guerre, ce roi de neige, comme on l’appela, succomba définitivement, le 8 novembre 1620, dans la bataille de Prague, erra quelque temps en Allemagne, puis se retira en Hollande avec sa famille, fut en 1621 mis au ban de l’empire, et se vit enfin dépouillé, au profit de Maximilien, duc de Bavière, de ses états héréditaires, aussi bien que de la couronne de Bohême, dont l’empereur Ferdinand reprit possession.

Sauf dans sa propre personne, Jacques ne pouvait guère être frappé d’un coup plus rude : il était atteint comme père, comme protestant, comme roi puissant en Europe. Il n’avait ni le cœur bien tendre pour ses enfans, ni une foi religieuse bien vive, ni une fierté royale bien susceptible; mais il était vain et faible, aisément entraîné par sa vanité au-delà de son opinion ou de son courage, incapable de résister aux instances passionnées de sa famille et de ses favoris. La ruine de l’électeur palatin et l’échec du protestantisme en Allemagne suscitèrent en Angleterre un grand mouvement national ; le parlement accorda, bien qu’avec parcimonie, des subsides pour venir à leur aide. Jacques envoya sur le Rhin quatre mille hommes, non pour rétablir son gendre et sa fille dans le royaume de Bohême, mais pour les maintenir dans leurs états héréditaires. Il faisait profession de détester les insurrections populaires, les élections de rois, et ne voulait qu’assurer à tous les princes la perpétuité de leurs possessions et de leurs droits. Pendant trois ans, en même temps que ses troupes gardaient à grand’peine les principales places du Palatinat, ses ambassadeurs parcoururent l’Allemagne, tentant à Bruxelles, à Vienne, à Prague, à Ratisbonne, divers moyens de pacification. Après quelques apparences favorables, ils échouaient toujours; l’empereur Ferdinand était intraitable. De l’influence de la seule cour de Madrid, le roi Jacques pouvait attendre, pour l’électeur palatin, un bon résultat; mais comment se flatter que la branche espagnole de la maison d’Autriche entrerait en lutte avec la branche allemande? Comment obtenir à la fois du roi Philippe III la main de l’infante sa fille pour le prince de Galles et le concours de sa diplomatie ou même de ses troupes contre l’empereur Ferdinand II? Ce fut là pourtant, après les désastres de son gendre, la double tentative et l’espérance du roi Jacques; il ne voulait ni renoncer au mariage espagnol, ni déserter complètement en Allemagne la cause protestante, et ses divers ambassadeurs en Espagne à cette époque, sir Walter Aston et lord Digby, eurent pour constante instruction de poursuivre à la fois ce double but, toujours sous la condition de ne brouiller le roi leur maître avec personne et de ne pas compromettre la paix européenne.

Autant les intentions du roi Jacques étaient compliquées et diffi-