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d’en séparer les richesses, en un mot tout le travail des chercheurs d’or se dessine pour ainsi dire sous nos yeux dans les instrumens et dans les machines qui ont dérobé au sol le plus convoité des métaux. Si pauvre que soit le règne animal dans cette partie du monde, on le voit pourtant assez bien représenté par les cuirs de kanguroo tannés que préparent les colons. L’Australie et la Nouvelle-Zélande occupent dans l’exposition universelle une place considérable, bien conforme d’ailleurs à l’importance de ces possessions anglaises. L’étendue, la variété, la qualité excellente des produits agricoles nous indiquent assez une terre fertile, un climat qui embrasse toutes les températures, tandis que les trésors géologiques fournissent à toutes les industries le fer, le cuivre, le plomb, le charbon, la malachite et les autres matières brutes qui, transformées par l’Anglo-Saxon, fondent la prospérité des états[1]. Au milieu de ces gerbes d’abondance, je regrette de ne point voir figurer davantage la race malaise, qui s’étend sur les îles de l’Océanie. À peine si je découvre même çà et là quelques traces des naturels de la Nouvelle-Zélande, cette famille d’hommes si curieuse que les ethnographes n’ont point encore réussi à classer. Tout annonce pourtant dans leur industrie, — des ustensiles domestiques, des vêtemens, des instrumens de pêche, — une race merveilleusement préparée pour recevoir la civilisation.

Arrivons maintenant à l’Asie, cette ruche des peuples d’où seraient sortis, à en croire quelques savans anglais, les premiers aventuriers qui ont peuplé l’ancienne Amérique et les îles de l’Océanie. Avec la race jaune ou mongolienne s’annonce dans l’histoire de l’industrie un grand progrès. À voir, dans la partie de l’exposition consacrée à l’Afrique et à l’Océanie, certaines contrées du globe presque uniquement représentées par l’inventaire de leurs richesses naturelles, on était porté à se demander s’il y a là des hommes. Il n’en est plus ainsi de la Chine, du Japon et du royaume de Siam. Les trois règnes de la nature, les richesses de la terre et du climat, se montrent ici modifiés par l’art et adaptés aux besoins de la vie sociale. Pour la première fois se dégage dans la recherche de l’utile un idéal quelconque. Cet idéal n’est point complet, je l’avoue : il nous reporte, avec moins de grandeur, vers les rêves étranges de l’ancienne Égypte ; il s’attache plutôt au fantastique et au grotesque qu’à la contemplation de la nature ; il abuse de la faculté de créer des monstres ; tel qu’il est néanmoins, il commande le respect des curieux et des artistes. La Chine trône à l’exposition au milieu de ses laques, de ses bronzes chargés de figures bizarres, de ses ini-

  1. Les mines de Barra-Burra ont fourni à l’exposition un bloc de minerai de cuivre qui pèse près de sept tonnes ; il s’est fait attendre quelque temps dans le palais de Kensington, tant il a été difficile de le décharger du navire et de l’amener sain et sauf à la place qui lui était réservée.