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cette taupinière les vestiges de la plus majestueuse des histoires.

On est devant le côté nord-ouest d’une colline trois fois plus longue que large et entre deux files de maisons qui en cachent les extrémités. Des deux escaliers qu’on a devant soi, celui de gauche, très large, très haut, très raide, conduit au portail d’une grande muraille de brique, façade de l’église d’Ara-Cœli, église fameuse par un bambino thaumaturge en cire, en pâte ou en bois. Les cent vingt-quatre marches qu’il faut gravir ont été, dit-on, arrachées aux marbres du temple de Jupiter Capitolin, dont elle remplit la place. La Gibbon, frappé du contraste, conçut l’idée d’écrire l’histoire de la décadence de l’empire. L’escalier en face de nous, mieux proportionné, plus doux, s’élève lentement par des degrés bas et larges dits à cordoni. C’est presque une rampe ornée de balustrades et de sculptures qui mène à une plate-forme fermée des trois autres côtés par trois corps de bâtimens séparés et symétriques. Cette cour et ces trois façades sont le Capitale d’aujourd’hui. On les désigne ainsi parce que là est le logis officiel du sénat romain, qui lui-même se compose d’un sénateur et de huit conservateurs, autant dire d’un maire et de huit adjoints. À droite c’est le palais des conservateurs, à gauche le musée, au fond le palais du sénateur ; tout cela veut dire un hôtel de ville. Ces édifices agréables sont de Michel-Ange ; du moins il les a commencés, et, renonçant cette fois à effrayer par le grandiose, il a proportionné le nouveau Capitole au nouveau sénat. Il a rempli convenablement une certaine dépression qui est au centre de la crête ou l’intermontium. Des deux tertres ainsi séparés, le palais des conservateurs nous cache celui où s’élevait l’Arx, le Capitole proprement dit, l’ancien Tarpeium, la citadelle que défendit Manlius et qui couvrait Rome du côté du Tibre. L’escarpement qui lui servait de base au midi était la roche Tarpéienne. C’était une chute à pic d’environ 12 mètres. On n’en peut guère juger qu’en entrant sur les terrains du palais Caffarelli ; mais de tout cela rien ne paraît du côté de la colline où nous sommes placés. Si nous la regardons comme un lieu historique, rien n’est distinct, reconnaissable, visible. Si nous la prenons comme un musée, c’est autre chose, et les voyageurs, qui ne sont pas tous comme M. Ampère, ne voient guère dans Rome qu’un musée.

L’escalier de la cour du Capitole dont nous avons parlé est couronné par deux statues de Castor et Pollux avec leurs chevaux, et deux trophées qui, malgré leur, nom, ne sont pas ceux de Marius, mais d’Alexandre Sévère. Ces marbres, que le temps n’a pas ménagés, forment, avec deux statues de Constantin et de son fils et deux colonnes milliaires, la bordure de cette place en terrasse du côté de l’entrée. Au milieu, une statue en bronze jadis doré, celle de