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nada. Les guerres de la révolution venaient de commencer : le prince fut envoyé aux Antilles, où il se distingua à l’attaque de la Martinique; mais son père resta inflexible, et il faut bien dire aussi que de son côté le duc, aigri par cette rigueur exagérée, n’avait pas apporté à sa conduite toutes les réformes désirables. Ce fut alors que son pèlerinage le conduisit à Halifax. Il fallut une absence de treize ans pour qu’on lui permît de venir prendre possession, à la chambre des lords, du siège auquel sa naissance lui donnait droit, à la condition d’être renvoyé à la Nouvelle-Ecosse aussitôt après. L’altération de sa santé mit seule un terme à cet exil. On le retrouve enfin gouverneur à Gibraltar, en lutte avec un inférieur auquel le roi donne raison contre lui, puis destitué comme un simple fonctionnaire, et demandant vainement un conseil d’enquête pour se justifier. Les dernières années de sa vie furent en proie aux embarras financiers les plus pénibles. A grand’peine put-il obtenir du prince-régent les moyens de quitter le continent, où il avait cherché un refuge contre ses créanciers, afin que l’enfant qui devait être la reine Victoria pût voir le jour sur le sol anglais. Il mourut un an après cette naissance. En visitant non loin d’Halifax les ruines du château où s’était écoulée une grande partie de cette triste existence, en la comparant à l’heureuse et brillante carrière de sa mère, le prince de Galles dut faire un singulier retour vers le passé.

Pour la Nouvelle-Ecosse comme pour le Canada, la question la plus importante devrait être l’émigration. — Nous avons trois millions d’habitans, et nous en pouvons loger quarante millions, — disent les Canadiens. Il en est de même, proportion gardée, pour la Nouvelle-Ecosse. Malheureusement pour elle, c’est surtout vers les bords du Saint-Laurent que, depuis trente ou quarante ans, le gouvernement anglais s’est appliqué à diriger son courant d’émigration dans ces pays, préoccupé qu’il était de la nécessité de fortifier cette barrière naturelle contre toute chance d’agression américaine. Il est à craindre qu’il n’en soit encore longtemps ainsi, et cependant, grâce au défaut de concurrence, peut-être la Nouvelle-Ecosse, tout oubliée qu’elle est, offrirait-elle à l’émigrant des avantages qu’il ne rencontrerait pas ailleurs. On y trouve facilement des terres d’excellente qualité, à demi défrichées, avec maison et grange en bois (ce que les Anglais appellent log-house), pour des prix qui varient de 20 à 35 francs l’hectare. Incultes et sans préparation, elles se vendent 4 francs l’hectare. De toutes les colonies anglaises, la Nouvelle-Ecosse est celle où le chiffre de l’impôt est le moins élevé : 13 francs environ par tête et par an, tandis qu’il est de 30 fr. à Terre-Neuve, de près de 100 fr. dans les établissemens du groupe australien, de 115 francs dans la Nouvelle-Zélande, et même de